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L'ABUSEUR DE SÉVILLE, Tirso de Molina Fiche de lecture

Publiée en 1630, cette comedia, l'une des plus célèbres du théâtre espagnol du Siècle d'or, fut probablement composée avant 1620. L'attribution à Tirso de Molina (1580 env.-1648) demeure aujourd'hui encore incertaine. L'Abuseur de Séville s'inspire d'anciennes légendes et poèmes populaires, où apparaissent les motifs de l'insulte faite à une tête de mort, du banquet funèbre ou du galant volage. Le mythe de Don Juan, que le dramaturge espagnol a génialement inauguré dans ce chef-d'œuvre, possède donc des sources multiples.

La justice de Dieu

L'action dramatique débute à Naples. Don Juan Tenorio, gentilhomme sévillan, au service de son oncle, don Pedro, ambassadeur d'Espagne, a réussi à obtenir les faveurs de la duchesse Isabelle en se faisant passer pour le duc Octave, son fiancé. La ruse découverte, il s'évade avec l'aide de Don Pedro Tenorio, qui a été chargé par le roi de Naples d'arrêter le trompeur.

Don Juan s'est embarqué pour l'Espagne ; il fait naufrage, se retrouve sur la côte de Tarragone. Sans plus tarder, en lui promettant le mariage, il obtient les faveurs de Tisbea, qui peu avant chantait son bonheur d'être libre de tout lien d'amour. Quand la belle pêcheuse comprend qu'elle a été dupée, de désespoir elle se jette dans les vagues.

Voici ensuite Don Juan à Séville (« Deuxième Journée »). Le roi Alphonse XI de Castille a décidé de lui donner pour épouse doña Ana de Ulloa. Mais il change d'avis quand il apprend les méfaits de Don Juan, et l'envoie en exil. En compagnie de son ami, le marquis de la Mota, cousin et amoureux de la noble dame, Don Juan fréquente les bas quartiers de Séville. Il intercepte un billet où doña Ana donne rendez-vous au marquis. Don Juan prend la place de son ami. Cette fois, l'affaire tourne mal. Don Gonzalo de Ulloa accourt aux cris de doña Ana, sa fille. Don Juan le tue avant de s'échapper.

En route pour l'exil, il fait halte dans un village, Dos Hermanas. Là, il assiste à la noce champêtre d'Aminta et de Batricio ; il séduit la mariée et abuse d'elle (« Troisième Journée »). Aux multiples mises en garde de son valet, Catalinón, Don Juan répond toujours, de façon désinvolte : « Bien lointaine est votre échéance ! »

Mais les victimes du séducteur réclament justice au roi. Don Juan, de retour à Séville, voit dans une église le mausolée de Don Gonzalo de Ulloa avec la statue du défunt. Par défi, il invite la statue du Commandeur à souper. Le mort accepte l'invitation. Pour rendre la politesse à son hôte, il le convie à son tour au lieu même où se trouve son tombeau. Entre-temps, le roi Alphonse XI, pour mettre fin au désordre, décide de marier Don Juan avec la duchesse Isabelle, venue aussi lui demander réparation. Pendant le dîner macabre, Don Gonzalo tend la main à Don Juan et s'apprête à l'entraîner en enfer. Le corps tout embrasé, Don Juan veut appeler un prêtre pour se confesser. Don Gonzalo refuse d'écouter cette ultime supplique et rétorque au mourant : « Ce feu est peu de chose auprès de celui que tu as cherché. Les merveilles de Dieu, Don Juan, sont impénétrables. Et c'est ainsi sa volonté que tu paies tes fautes par les mains d'un mort et si tu paies ainsi, c'est la justice de Dieu : „Œil pour œil, dent pour dent...“ » La mort du séducteur permet le rétablissement de l'ordre un moment menacé.

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Écrit par

  • : professeur émérite des Universités, membre correspondant de la Real Academia Española

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  • DON JUAN

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    • 5 639 mots
    Cette histoire, le frère Gabriel (qui signait Tirso de Molina pour le théâtre) l'a-t-il inventée de toutes pièces ? Il est certain (cf. l'ouvrage capital de Gendarme de Bevotte) qu'il a mis à profit, en les fusionnant, des traits puisés à diverses sources littéraires et folkloriques. Il est beaucoup...