L'ÉTAT DE SIÈGE (mise en scène E. Demarcy-Mota)
Un spectacle choral
Peu représenté depuis sa création, L’État de siège a retrouvé le haut de l’affiche en mars 2017 avec le metteur en scène et directeur du Théâtre de la Ville Emmanuel Demarcy-Mota, convaincu de son actualité et de sa forte résonance dans le temps présent. À l’Espace Cardin à Paris, son théâtre étant en travaux, il a inversé et ouvert le rapport scène-salle, surmontées de trois écrans vidéo, en plaçant les spectateurs sur le plateau au niveau de l’orchestre et sur les balcons. Il a ainsi créé une relation spatiale et esthétique à même d’accompagner le souhait d’Albert Camus de rompre avec une conception théâtrale classique pour créer « un spectacle dont l’ambition avouée est de mêler toutes les formes d’expression dramatique depuis le monologue lyrique jusqu’au théâtre collectif, en passant par le jeu muet, le simple dialogue, la farce et le chœur ». Confrontées à un certain manque d’unité de la pièce, ces caractéristiques rendaient complexe la mise en œuvre de sa réalisation scénique. Avec d’excellents comédiens, parmi lesquels Serge Maggiani, Valérie Dashwood, Hugues Quester, Matthieu Dessertine, Hannah Levin Seiderman, Alain Libolt, Philippe Demarle, la mise en scène d’Emmanuel Demarcy-Mota dégageait une théâtralité indéniable et une densité visuelle évidente dans sa production d’images. Elle n’en conservait pas moins une large part de l’étrangeté décalée portée par l’écriture de la pièce et les interrogations qu’elle suscite.
Après sa programmation parisienne, le spectacle a effectué une importante tournée au Canada et aux États-Unis (New York, Los Angeles, San Francisco…) où il a reçu un accueil particulièrement chaleureux. Au fil de ces étapes, le metteur en scène a procédé à certains ajustements dans le rythme, le jeu et les contours des personnages, gommant certaines disparités, afin de dissiper les zones d’ombre de la pièce. Reprise à l’Espace Cardin en mars-avril 2018, cette fois dans un rapport frontal classique resté ouvert, cette nouvelle représentation conforte sa théâtralité dans une unité collective en rendant plus perceptibles la pensée et les problématiques de Camus, qui demeurent d’une brûlante actualité dans le monde d’aujourd’hui.
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Écrit par
- Jean CHOLLET : journaliste et critique dramatique
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