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L'HOMME MOÏSE ET LA RELIGION MONOTHÉISTE, Sigmund Freud Fiche de lecture

L'exil de Freud - crédits : Keystone/ Getty Images

L'exil de Freud

Cet ouvrage de Sigmund Freud fut publié en 1939 simultanément en allemand à Amsterdam sous le titre Der Mann Moses und die monotheistische Religion. Drei Abhandlungen, et à Londres en anglais, traduit par Katherine Jones sous le titre Moses and Monotheism. Livre de l'exil, il paraît quelques mois avant la mort de Freud et s'inscrit dans la suite logique de Totem et Tabou qu'il approfondit et complète : ce qui fait la force d'une religion, ce n'est pas sa vérité matérielle mais sa vérité historique ; c'est le retour du refoulé qui confère à toute religion sa puissance contraignante ; les processus qui opèrent sur les peuples sont analogues à ceux qui opèrent sur la subjectivité individuelle, la formation d'une religion étant analogue à celle d'une névrose.

Élaboration

Le 30 septembre 1934 Freud annonce à Arnold Zweig qu'il a écrit quelque chose qui l'a tellement occupé que tout le reste est passé au second plan : «  En face des nouvelles persécutions, on se demande de nouveau comment le Juif est devenu ce qu'il est et pourquoi il s'est attiré cette haine éternelle. Je trouvais bientôt la formule. Moïse a créé le Juif... » Mais ce texte est destiné à rester secret. Freud pense en effet que sa publication pourrait ébranler l'Église autrichienne, dernier rempart à ses yeux contre le nazisme, et risque de provoquer une interdiction de la psychanalyse à Vienne. Mais ce travail va le poursuivre comme une âme en peine. Il fera l'objet de diverses réécritures et de deux publications partielles dans la revue Imago en 1937 : « Moïse, un Égyptien ? » et « Si Moïse fut un Égyptien ». Exilé à Londres en 1938, Freud réélabore la partie la plus importante de son travail, « Moïse, son peuple et la religion monothéiste », et publie l'ensemble des trois textes sous le titre L'Homme Moïse et la religion monothéiste. Trois essais.

La construction freudienne de la préhistoire du peuple juif prend appui sur les travaux des historiens – et en particulier sur ceux d'Ernst Sellin, historien spécialiste de la Bible appartenant à l'école exégétique allemande, qui avançait que Moïse avait été assassiné au cours d'un soulèvement de son peuple –, mais aussi sur le texte biblique marqué de contradictions, d'illogismes et de lacunes, qui sont pour l'analyste Freud autant de traces d'éléments censurés à reconstruire. Il avance ses hypothèses pas à pas ; entre doutes et certitudes, entre contradictions et répétitions, le texte freudien trace un chemin prudent et rigoureux. Le meurtre de Moïse et son désaveu sont la pièce principale de la construction freudienne : événement traumatique, ce meurtre provoque le refoulement de l'enseignement de Moïse qui va ensuite peu à peu faire retour ; son désaveu constitue, selon Freud, l'une des racines de l'antisémitisme. Freud fait l'hypothèse d'une fondation en trois temps de la religion juive : après la mort d'Akhenaton, Moïse, un Égyptien de haut rang, fuit l'Égypte avec des tribus sémites auxquelles il transmet la religion monothéiste et hautement spiritualisée d'Aton. Environ deux générations après le meurtre de Moïse, ces tribus s'unissent à d'autres et adoptent, selon les historiens contemporains de Freud, la religion polythéiste et barbare de Yahvé, démon des volcans. Mais la doctrine mosaïque refoulée fera retour au cours des siècles par la voix des prophètes et s'imposera au peuple.

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L'exil de Freud - crédits : Keystone/ Getty Images

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