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L'UTILITARISME, John Stuart Mill Fiche de lecture

John Stuart Mill - crédits : London Stereoscopic Company/ Hulton Archive/ Getty Images

John Stuart Mill

Composé entre 1854 et 1860, L'Utilitarisme (Utilitarianism) parut d'abord dans les livraisons d'octobre, novembre et décembre 1861 du Frazer's Magazine avant de faire en 1863 l'objet d'un ouvrage qui sera réédité quatre fois du vivant de son auteur, John Stuart Mill (1806-1873). Faisant suite au Système de logique déductive et inductive (1843), aux Principes d'économie politique (1848) et à De la liberté (1859), cette œuvre de maturité s'inscrit dans le schéma de pensée empiriste, associationniste et sensualiste de l'école utilitariste rassemblée autour de J. Bentham et du père de Mill, James Mill. Répondant, par devoir filial, aux critiques (notamment celles de Dickens) adressées à ce dernier, L'Utilitarisme, tout comme L'Essai sur Bentham (1828), signale l'orientation nouvelle prise par cette philosophie morale : influencé par Coleridge, Carlyle, Saint-Simon et Comte, mais aussi par son épouse H. Taylor, Mill avance un « utilitarisme indirect » qui s'éloigne de la théorie du bonheur fondée, dans sa version première, sur la stricte « arithmétique du plaisir » individuel.

Une morale utilitariste et altruiste

Ouvrage d'une centaine de pages, L'Utilitarisme s'ouvre sur un très court chapitre dans lequel Mill, après avoir fait remonter la tradition utilitariste à Socrate, critique les philosophies intuitionnistes et invite à dépasser la définition kantienne de l'obligation morale au nom de son conséquentialisme.

Le chapitre ii affirme que « les actions sont bonnes ou mauvaises dans la mesure où elles tendent à accroître le bonheur, ou à produire le contraire du bonheur ». Mais cet hédonisme, pour ne pas réduire l'homme en quête de plaisir à un animal, impose de ne pas confondre bonheur et satisfaction et d'introduire une différence qualitative entre les plaisirs – les plus désirables étant ceux qui mettent en œuvre les facultés supérieures – que l'expérience nous assure d'opérer. En définitive, « le bonheur qui constitue la norme utilitariste de la conduite bonne n'est pas le bonheur propre de l'agent, mais le bonheur de tous ceux concernés ». Fondé non pas sur l'intérêt mais sur l'utile, cet idéal n'est accessible que sous certaines conditions sociales et culturelles propres à orienter naturellement et sans esprit de sacrifice le développement des potentialités individuelles vers le bien de la société.

Comment créer et faire respecter les conditions de cet altruisme ? Tel est l'objet du chapitre iii qui traite de la question des sanctions et du sentiment du devoir. Si la morale utilitariste dispose de « sanctions extérieures » (craintes de ses semblables ou de Dieu) et de « sanctions intérieures » (le sentiment d'obligation morale), c'est surtout dans le sens social dont dispose tout individu que Mill y voit son fondement le plus solide.

Le chapitre iv est consacré au problème des « preuves du principe d'utilité ». Partant de l'idée que « la seule chose qu'on puisse donner pour établir qu'une chose est désirable, c'est en fait qu'on la désire », Mill voit dans la vertu, définie comme moyen du bonheur puis comme fin en soi, l'objet de désir le plus à même de remplir l'objectif utilitariste. Suit une discussion sur la notion de volonté qui, née du désir, est entretenue par l'habitude, laquelle garantit l'accomplissement des devoirs vertueux indépendamment des plaisirs et des peines qu'ils procurent.

Pour établir l'absence d'opposition entre les catégories du juste et de l'utile, le long chapitre v entreprend d'abord une enquête sur l'origine du sentiment de justice à travers le recensement des motifs des actes réputés répréhensibles (infraction aux justices légale et morale, absence de mérite, manquement[...]

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Écrit par

  • : docteur en sociologie, D.E.A. de philosophie, maître de conférences à l'université de Paris V-Sorbonne

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John Stuart Mill - crédits : London Stereoscopic Company/ Hulton Archive/ Getty Images

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  • UTILITÉ PRINCIPE D'

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    • 2 290 mots
    ...à fait faux, celui du bonheur » (Critique de la raison pratique, 1788). Quant à John Stuart Mill (1806-1873), il explique qu'il a été « le premier à mettre en circulation le mot utilitarisme », qui sert même de titre à l'un de ses ouvrages les plus célèbres (L'Utilitarisme, 1861).