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LA BATAILLE D'ALGER, film de Gillo Pontecorvo

Hormis quelques rares tentatives, le cinéma français a occulté la guerre d'Algérie, qui demeure à divers égards un contentieux ouvert. Le Petit Soldat, plaidoyer antimilitariste de Jean-Luc Godard, sera interdit en 1960. Élise, ou la Vraie Vie (1969), de Michel Drach, n'aborde la question que de façon connexe. Quant à Avoir 20 ans dans les Aurès (1971) de René Vautier, il n'obtiendra son visa d'exploitation qu'à la suite d'une grève de la faim de son réalisateur. Enfin, Yves Boisset fut lui aussi victime des pires tracas de la part du ministère des Armées lors du tournage de R.A.S. (1973).

Le réalisateur de La Bataille d'Alger (La battaglia di Algeri, 1966), Gillo Pontecorvo, a d'abord été correspondant, à Paris, de plusieurs journaux italiens, avant de devenir l'assistant d'Yves Allégret et de Mario Monicelli. Lorsqu'il envisage, en pleine guerre d'Algérie, de réaliser un film sur les événements, il a déjà deux longs-métrages ambitieux à son actif : Un dénommé Squarcio (La grande strada azzura, 1957), avec Yves Montand, et Kapo (1960), qui témoignent de son goût pour les films populaires à portée politique. Un an de préparation et quatre mois de tournage en extérieurs seront nécessaires à la réalisation de La Bataille d'Alger, une coproduction italo-algérienne supervisée par Alger. Couronné à Venise en 1966, le film sera loué pour le réalisme de la reconstitution de cet épisode essentiel de la guerre. Interdit à sa sortie en France, il sera mis à l'affiche en 1970, puis retiré pour n'être projeté régulièrement qu'après 1971.

Une reconstitution réaliste

La Bataille d'Alger est adaptée du livre de Yacef Saadi, co-producteur du film et interprète de son propre rôle de commandant du F.L.N. Ce film ne comporte aucune image d'archives, mais se réfère à des faits authentiques. En novembre 1954, les différentes tendances du nationalisme algérien déclenchent une insurrection armée contre la France colonisatrice de l'Algérie depuis 1830. Elle touche deux ans plus tard la ville d'Alger avec une série d'attentats le 30 septembre dans des cafés fréquentés par les Français. Le film montre le basculement progressif de la ville dans l'insurrection et retrace les moments forts du conflit, avec notamment l'offensive menée le 7 janvier 1957 par les parachutistes français, disposant des pleins pouvoirs de police, contre les réseaux terroristes urbains du F.L.N. Scrupuleusement reconstituée et tournée en extérieurs à Alger, la guerre d'Algérie apparaît sous un jour très réaliste : attentats à la bombe, rafles et ratonnades, tortures... Le 7 octobre 1957 marque la fin de la bataille d'Alger, mais pas de la guerre. La pacification d'Alger a été menée de manière musclée, les renseignements étant obtenus sans aucun ménagement. Le 16 septembre 1959, de Gaulle reconnaît le droit à l'autodétermination du peuple algérien qui descend en masse de la Casbah pour fêter son indépendance future et hisser le drapeau vert et blanc du F.L.N.

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Écrit par

  • : maître de conférences, sociologue à l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle

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Autres références

  • PONTECORVO GILLO (1919-2006)

    • Écrit par
    • 832 mots

    Né à Pise en 1919 dans une famille juive aisée, le réalisateur Gillo Pontecorvo fuit le fascisme et s'installe en France après l'instauration dans son pays des lois raciales de 1938. Diplômé de chimie, il gagne sa vie comme correspondant de plusieurs journaux italiens. Il fréquente les milieux antifascistes,...