LA CITÉ DU SOLEIL, Tommaso Campanella Fiche de lecture
Une tyrannie du bonheur
La rigueur du système est si omniprésente que la répression cède rarement à la cruauté. Les châtiments sanctionnant le mensonge, les manquements à l'entraide ou l'égoïsme consistent à éloigner les coupables de la table commune, à les priver « du commerce des femmes, ou de certains honneurs, aussi longtemps que le juge l'estime nécessaire à leur amendement ».
La justice, universellement distribuée, n'a nul besoin de recourir à la prison et au bourreau. Exceptionnellement prononcées, les condamnations à mort, appliquées par une lapidation à laquelle participe l'ensemble des citoyens, réclament l'assentiment de l'accusé, invité à reconnaître le bien-fondé de la peine encourue. Le sacrifice, prévu pour expier une faute collective, se borne à l'exposition, sur le toit du temple, d'un volontaire priant pour les péchés de tous, soumis à des privations et voué ensuite à une vocation sacerdotale.
Outre la défense de la république contre les éléments extérieurs, les guerres, soigneusement préparées par une formation militaire, répondent à la nécessité de canaliser l'agressivité et à l'empêcher de susciter des conflits internes. Rien n'est laissé au hasard. Les règles de gouvernement procèdent d'une étude des comportements, qui ne dédaigne ni l'astrologie, ni la numérologie. Si déterminantes que puissent paraître les influences extérieures, elles n'ôtent cependant pas à l'homme un libre arbitre qui le rend responsable de ses actes.
On ne peut aborder La Cité du Soleil sans réévaluer la traditionnelle identification de l'utopie à une irréalité, car il n'est pas un régime totalitaire, qu'il soit théocratique, national-socialiste ou collectiviste de type stalinien, qui n'ait fait sienne l'une ou l'autre mesure envisagée par Campanella pour régenter les êtres humains avec la perfection qui préside à l'arrangement des choses.
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Écrit par
- Raoul VANEIGEM : écrivain
Classification
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