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LA CITÉ INTERDITE. VIE PUBLIQUE ET PRIVÉE DES EMPEREURS DE CHINE, 1644-1911 (exposition)

Organisée au musée du Petit Palais à Paris (9 novembre 1996-23 février 1997), l'expositionLa Cité interdite. Vie publique et privée des empereurs de Chine (1644-1911) propose une présentation somptueuse, mais peut-être conventionnelle, d'un choix d'objets provenant de l'ancien palais des souverains chinois.

Le thème principal est sans doute un thème facile, destiné à un vaste public et souvent utilisé : il a servi à diffuser dans le monde une image stéréotypée de la Chine, où ne figuraient ni sa diversité ni son évolution. Et les esprits chagrins d'ajouter qu'en se limitant à l'ultime dynastie impériale (1644-1911), qui remodela le palais des Ming, dynastie récente dans la mémoire collective et forcément bien connue, les organisateurs ont réduit d'autant leurs soucis. De fait, cette restriction ne limite ni les questions posées – elle y ajoute au contraire celle de l'identité mandchoue – ni les risques encourus, et surtout celui de minimiser la part que les Mandchous prirent à l'édification de la Chine moderne. En dépit, ou peut-être à cause de cela, l'exposition, avec quelques très beaux objets et une mise en scène efficace dans ses grandes lignes, est un spectacle réussi, dont le visiteur sort avec quelques notions nettes sur le palais et une vision plus indécise des empereurs mandchous dans leur vie publique et privée. La démonstration ne prend néanmoins tout son sens et toute sa dimension qu'avec le catalogue. Les aspects essentiels du sujet sont ici analysés et poussés au fond, avec une simplicité et une unité de ton qui mettent les travaux les plus avancés à la portée des profanes et stimulent la curiosité des amateurs plus éclairés.

Gilles Béguin, commissaire général de l'exposition, a très habilement réduit, dès l'entrée, les soixante-douze hectares de bâtiments et de jardins de la Cité interdite à une grande maquette, soutenue par les descriptions du catalogue : l'axe central, épicentre du fonctionnement du palais impérial et de l'empire, y est mis en évidence. Le décor ainsi planté, on comprend que c'est l'intérieur – les fonctions de l'édifice et de ses hôtes – qui sera étudié et que dès lors l'évocation a été préférée, avec raison, à l'impossible réduction en une dizaine de salles de près de trois siècles de confrontation entre le monde mandchou et la tradition chinoise. Ainsi, autour de deux armures impériales, placées sur l'axe central, les armures plus simples des hommes des Bannières (divisions) mandchoues forment un quadrilatère qui rappelle l'enceinte du palais. L'image du cercle intérieur, c'est-à-dire du palais au cœur de l'empire, désormais formé et défendu par des forces qui lui étaient jusqu'alors extérieures, résume et matérialise le brillant exposé de Pierre-Étienne Will, qui montre combien ces termes dirigèrent le comportement parfois paradoxal et l'administration des « barbares » mandchous – guerriers étrangers, extérieurs à la Chine et devenus empereurs de Chine – et décrit les étapes de leur œuvre de reconstruction, leur déploiement jusqu'aux frontières les plus reculées que l'empire ait connues, les ferments de leur déclin et de leur chute. Aux armures sans visage des conquérants succèdent logiquement les portraits officiels des empereurs, conformément à la tradition chinoise, à côté desquels l'exception mandchoue, dans le goût et la conscience de ses armes (essais et notices d'Oliver Moore) et dans son ouverture mesurée à l'extérieur, s'affirme encore dans le célèbre portrait équestre de Qianlong par le jésuite Castiglione.

Le fonctionnement de l'imposante machine politique mandchoue, sa complexité et ses contradictions, est illustré dans sa hiérarchie comme dans ses rites, sinon dans[...]

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