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LA DANSE DE LA FORÊT, Wole Soyinka Fiche de lecture

Wole Soyinka - crédits : Keystone-France/ Getty Images

Wole Soyinka

Écrite à l'occasion des cérémonies de l'indépendance du Nigeria en 1960, la première pièce du dramaturge nigérian Wole Soyinka, La Danse de la forêt, est un texte qui, pour une œuvre de commande, témoigne d'une étonnante liberté de ton et d'esprit.

Une danse de vie et de mort

À l'origine, il s'agit bien d'une célébration : celle du grand « rassemblement des tribus » organisé par les habitants d'un village de brousse. Mais les festivités tournent vite court. Le sculpteur Démoké, à qui on avait demandé de dresser un totem géant, vient confesser que, sous l'emprise de la jalousie, il a précipité dans le vide son apprenti qui avait réussi à monter plus haut que lui au faîte de l'arbre. Rongé de remords, l'artiste parcourt la forêt sans la reconnaître car elle a été rasée autour de son totem, sous prétexte de mieux mettre en évidence son chef-d'œuvre.

Les villageois ont également demandé aux dieux de leur envoyer, pour cette occasion, des ancêtres qui symboliseraient le passé glorieux de leur pays. Mais les morts qui se présentent ne sont qu'un capitaine en loques et sa femme éternellement enceinte qui reviennent sur terre pour se lamenter et demander réparation des torts qu'ils ont subis dans le passé.

Tous ces désastres proviennent, en fait, des interventions maladroites des dieux. Le sculpteur est ainsi victime d'un conflit violent entre le dieu Ogoun qui le protège et le dieu Oro qui n'accepte pas que le totem ait été érigé au cœur d'un de ses bois sacrés. En dépit de leurs déclarations bravaches, ces dieux querelleurs et ridicules ne parviennent pas à contrôler le destin des humains qu'ils prétendent régenter, et restent paralysés par leur « vieille réputation d'inefficacité ».

Ainsi parle le Père de la forêt qui, tout au long de la pièce, est le porte-parole souverain mais désabusé du dramaturge : « Mon secret est un éternel tourment : percer la croûte épaisse de l'habitude qui étouffe les âmes, et leur tendre le miroir de la nudité originelle – sachant pertinemment que tout ceci est vain. » C'est lui qui organise la cérémonie de bienvenue aux morts que les humains leur refusent. En une suite d'apparitions stylisées, il fait défiler devant eux les beautés inquiétantes mais somptueuses de la forêt africaine. Se succèdent alors sur scène les démons des roches, les génies des arbres, les esprits des ténèbres, des pierres précieuses, des pachydermes, du soleil, des fleuves qui viennent dire leur fierté d'appartenir à une Afrique fastueuse mais aussi leur inquiétude de la voir de plus en plus irrémédiablement dénaturée.

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Wole Soyinka - crédits : Keystone-France/ Getty Images

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