LA DESTINATION DE L'HOMME, Johann Gottlieb Fichte Fiche de lecture
Une déconstruction de la métaphysique
Les intérêts de ce texte littérairement passionné et philosophiquement rigoureux ne sont pas seulement historiques : il s'agit bien là, avant l'heure, d'une déconstruction de toute la métaphysique de la subjectivité et de ses illusions. L'intersubjectivité est au centre des préoccupations du Moi, et c'est l'inquiétude morale qui va nous permettre de sortir du néant auquel le solipsisme devait nous vouer. L'action en commun inscrit dans le monde l'horizon d'un idéal à réaliser. Idéal infini qui prend corps dans l'« œuvrer » collectif et fini des hommes. Fichte rejoint ainsi, à partir d'une philosophie de la subjectivité, les questions les plus pressantes qu'auront eu à affronter les penseurs modernes (on songe non seulement à Husserl mais aussi à Sartre ou Lévinas). Il faut aussi noter que Fichte, tout particulièrement dans ce texte, procède à une quasi- « phénoménologie de la perception » qui anticipe sur les descriptions de Bergson ou de Merleau-Ponty, en reléguant tout à la fois idéalisme et réalisme pour s'acheminer vers une pensée du rapport au sensible active et créatrice, où communiquent moi et réel. Enfin, et c'est là un des enjeux principaux du texte, dans ce processus critique visant à supprimer tout écart entre sensible et suprasensible, Fichte fait du divin « l'inconditionnalité jaillissant au cœur de la conditionnalité : [...] l'être décidé de l'homme au sein d'une communauté spirituelle, et cette communauté même » (J.-C. Goddard).
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Écrit par
- Francis WYBRANDS : professeur de philosophie
Classification
Média