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LA MACHINE À EXPLORER LE TEMPS, Herbert-George Wells Fiche de lecture

Une satire sociologique

Avec La Machine à explorer le temps, Herbert George Wells inaugure un nouveau genre littéraire, celui de la science-fiction, à un moment où la société britannique, en cette fin du xixe siècle connaît une phase de prodigieux essor technologique. L'œuvre se présente comme un véritable conte philosophique, une réflexion sur l'avenir incertain d'une humanité dominée par des techniques qu'elle a elle-même créées. C'est donc une méditation véritable sur les destinées de l'homme, influencée par l'éclosion du darwinisme : La Descendance de l'homme et la sélection sexuelle de Charles Darwin a paru en 1871. De même que certaines espèces ont été vouées à disparaître, la pérennité de l'espèce humaine pose un problème nouveau, celui d'une société qui se dote de progrès techniques d'une manière accélérée, au risque de ne pouvoir en maîtriser le développement. Cette réflexion sera poursuivie par Aldous Huxley dans Le Meilleur des mondes (1932). La Machine à explorer le temps est empreinte d'une double dimension sociologique et satirique. Sociologique d'abord parce qu'elle analyse l'inhumanité de la condition des prolétaires dans la société capitaliste, qui les exclut des bienfaits d'un progrès social réservé à la classe dominante, laquelle s'avère incapable en fin de compte de défendre son propre groupe, et se voit dévorée à son tour par ceux qu'elle avait voués au sous-sol et aux feux de la mine. Satirique ensuite, parce qu'elle oppose deux groupes incapables de se passer l'un de l'autre, renvoyant dos à dos l'indolence et la frivolité des Éloïs, et l'ingéniosité et l'appétit de nourritures carnées des Morlocks, symbole par excellence d'un état de développement rudimentaire. D'un côté, un groupe éthéré se dissout dans les plaisirs futiles, de l'autre de consentants esclaves subviennent à tous leurs besoins, pour mieux se nourrir d'eux par la suite. L'espoir réside finalement non dans les capacités intellectuelles et techniques, mais dans la victoire du sentiment : « Lorsque l'intelligence et la force viendront à manquer, la gratitude et l'affection réciproque continueront à vivre dans le cœur de l'homme. »

— Jean-François PÉPIN

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Écrit par

  • : agrégé d'histoire, docteur ès lettres, professeur au lycée Jean-Monnet, Franconville

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