MECQUE LA
Ville sainte de l'islam vers laquelle se tournent tous les musulmans pour prier et en laquelle ils doivent, s'ils en ont les moyens, se rendre en pèlerinage au moins une fois dans leur vie.
Avant l'établissement de l'islam, La Mecque (de l'arabe Makka) est essentiellement une cité commerçante. Bien que son existence soit plus ancienne, ce n'est qu'au vie siècle qu'elle commence à jouer un rôle dans l'histoire mondiale : située au nœud des voies commerciales qui relient la Syrie et la Palestine au golfe Arabique, au Yémen et à l'Abyssinie, c'est par elle que doivent transiter les produits de luxe venus du Sud pour parvenir à Byzance. Quelle est alors la situation sociale, économique, politique et religieuse de La Mecque ? « La Mecque et Médine étaient des îles dans un océan de déserts ou tout au moins de steppes, nourrissant encore d'étroits rapports économiques avec les nomades, habitées par des descendants de nomades encore attachés à beaucoup de coutumes d'enfants du désert léguées par leurs ancêtres » (W. M. Watt, Mahomet à La Mecque, 1958). Bien que sédentarisés, ou en voie de l'être, les Mecquois gardent les mœurs et la psychologie de l'Arabe nomade que l'on pourrait caractériser ainsi : « L'Arabe oscille constamment entre deux pôles : un individualisme qui le pousse à rejeter toute contrainte, à affirmer les droits imprescriptibles du moi devant les devoirs collectifs, et un attachement à son groupe social d'une profondeur et d'une spontanéité qui peuvent aller jusqu'au sacrifice total de la personne » (R. Blachère, Histoire de la littérature arabe des origines à la fin du XVe siècle de Jésus-Christ, 1952). Par suite de cette persistance de la mentalité nomade, la cité mecquoise, loin d'être un État, n'est qu'un groupement de clans se réclamant d'un ancêtre commun, Kuraysh, liés par des intérêts économiques qui imposent une certaine unité, gouvernés par un sénat délibératif et non exécutif, analogue au conseil des anciens de la tribu nomade. Vivant du transit caravanier, La Mecque est une place financière dont les habitants pratiquent des opérations de crédit et de spéculation. On comprend que la politique des Kurayshites n'ait qu'un but : préserver leur monopole commercial et, pour cela, assurer la libre circulation de leurs caravanes sur les pistes du désert, par la négociation ou par la force. Quant à la religion des Arabes du vie siècle, elle varie d'un culte rendu à une multiplicité de petits dieux à un certain monothéisme. Ces divinités sont matérialisées par des pierres. La Mecque est le centre de ce culte : la Pierre noire est placée dans une construction de forme cubique (la Ka‘ba), près d'un puits sacré (le puits de Zamzam), le tout inséré dans une enceinte sacrée (ḥaram). Le culte consiste essentiellement en une circumambulation.
On connaît l'accueil que firent les notables mecquois au message de Mahomet et les vexations diverses qu'ils infligèrent à l'Envoyé de Dieu, le contraignant à la fuite (hidjra) à Médine en 622. Plutôt que de retracer les luttes que Mahomet dut mener contre ses contribules (on en trouvera le détail dans les biographies du Prophète), mieux vaut examiner les conséquences de ces combats sur La Mecque elle-même. Il est hors de doute qu'ils amenèrent la diminution des échanges commerciaux, car les troupes du Prophète multipliaient les razzias contre les caravanes mecquoises, mais le retour du Prophète à La Mecque en 629 ne marque pas une rupture profonde avec l'ordre ancien : si le monothéisme est instauré dans la ville, la Pierre noire et la Ka‘ba sont maintenues, ainsi que le puits de Zamzam et l'enceinte sacrée, de même le pèlerinage musulman reprend le rite de la circumambulation. La plus grande partie de l'oligarchie[...]
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Écrit par
- Georges BOHAS : docteur ès lettres, directeur de l'Institut français d'études arabes de Damas
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Médias
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