LA MORT D'ARTHUR, Thomas Malory Fiche de lecture
Plus que Chrétien de Troyes et que ses continuateurs, cette somme anglaise des aventures du roi Arthur et des chevaliers de la Table ronde est la source de tous les prolongements modernes. Elle fut achevée en 1469-1470 par « un chevalier prisonnier, sire Thomas Malleorré », comme l'indique le narrateur à la fin de son premier récit. Parmi les candidats proposés, le plus probable est un prisonnier à Londres, Thomas Malory, accusé – mais non pas convaincu – de viols et de pillages, né en 1408 et mort le 14 mars 1471. Le titre pour l'ensemble de l'œuvre est dû au premier éditeur, William Caxton (1485). Il est inexact, puisque le texte consiste en bien d'autres épisodes, mais il sonne juste, puisque l'ouvrage culmine et s'achève avec la dislocation de la Table ronde et la disparition du roi. La tonalité dominante est épico-élégiaque : lorsque Malory écrit son texte, le monde héroïque des chevaliers arthuriens a disparu.
Arthur et Lancelot
Dans sa Préface, Caxton se reconnaît l'auteur du titre, ainsi que de la division en vingt et un livres et cinq cent sept brefs chapitres. On peut vérifier le travail d'éditeur de Caxton car on a retrouvé, en 1934, dans la bibliothèque du Collège de Winchester (Hampshire) un manuscrit soigneusement copié : Caxton l'a généralement suivi, sauf pour le livre V et de multiples détails de style.
Le manuscrit de Winchester est divisé en huit récits. Eugène Vinaver, son éditeur, interprète ces récits comme des unités indépendantes. Il est pourtant plus satisfaisant de les interpréter comme formant un tout. On peut distinguer trois parties. La première comprend les deux récits initiaux : enfance d'Arthur, victoires et couronnement. Dans la partie médiane, Malory rapporte les prouesses des compagnons du roi : d'abord le meilleur de tous, Lancelot ; puis Gareth ; puis Tristan et son rival en amour, Palomidès ; vient enfin la quête du Saint-Graal. Dans la troisième et dernière partie, Malory montre l'impossible passion – amour et souffrances – de Lancelot pour Guenièvre, l'épouse d'Arthur, qui entraîne la discorde entre les chevaliers de la Table ronde, et la mort que s'infligent mutuellement Arthur et son fils et neveu Mordret. Le cinquième récit du manuscrit de Winchester, consacré à Tristan, est le plus long : l'amour de Tristan pour Yseut, mariée au (mauvais) roi Marc, annonce les deux derniers récits. L'ouvrage de Malory entrelace donc une chronique du règne d'Arthur, une suite d'aventures chevaleresques et une exaltation de l'amour, absolu, fidèle, tragique.
Le personnage principal est Lancelot, chevalier modèle, c'est-à-dire guerrier vaillant et parfait amant. Malory nous interdit de le condamner. Ainsi, l'auteur fait suivre la scène d'amour réunissant Lancelot et Guenièvre de l'épisode où sire Urré, victime d'une sorcière, ne peut être guéri que par le meilleur des chevaliers, le plus chrétien parce que le plus humble : Lancelot. La fin de Lancelot et de Guenièvre est des plus édifiantes ; elle se fait moniale et lui, à son exemple, ermite : « Puis il tomba à genoux et pria l'évêque de le confesser et absoudre. Ensuite il supplia l'évêque de l'accepter pour frère en religion. L'évêque lui dit : „Volontiers et avec joie.“ Lors, il lui imposa l'habit, et céans Messire Lancelot servit Dieu jour et nuit dans les prières et les jeûnes. »
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Écrit par
- André CRÉPIN : professeur émérite à l'université de Paris-IV
Classification
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