LA NATURE DE LA FIRME, Ronald Harry Coase Fiche de lecture
Le destin de The Nature of The Firm (La Nature de la firme) est assez singulier dans l'histoire de la pensée économique. Écrit en 1937 par Ronald Harry Coase, dans un style littéraire, sans mathématique, cet article court ne fut pleinement exploité qu'au cours des années 1970. Il justifiera de plus l'attribution à Coase du prix Nobel d'économie 1991. L'article aborde la question essentielle des modalités de coordination entre les agents économiques. Certes, un certain nombre de prédécesseurs, comme John Bates Clark ou Franck Knight, ont reconnu le rôle de coordination de l'entrepreneur, mais Coase veut aller plus loin et entend expliquer pourquoi le marché et la firme sont deux modes de coordination économique coexistants.
Penser le système économique implique de penser les organisations, les institutions, les multiples arrangements contractuels, les règles juridiques. Ces préoccupations, transmises en héritage par l'article de Coase, pénètrent au cœur de la théorie économique, avec le courant d'analyse économique du droit ou la théorie des coûts de transaction.
Expliquer l'existence des firmes
Coase part d'une question faussement naïve : pourquoi la coordination entre agents économiques quant à l'usage des ressources se fait-elle tantôt par le marché, tantôt par les firmes, et donc, pourquoi existe-t-il des organisations telles que les firmes dans une économie de marché (partie I) ? Cela tient, selon lui, aux coûts d'utilisation du mécanisme de prix (parties II et III) et d'accès au marché. Ces coûts, appelés plus tard « coûts de transaction », sont dans les termes employés par Coase les coûts de « découverte des prix adéquats [...], de négociation et de conclusion des contrats ». Si l'accès au marché se faisait sans coût, il n'existerait qu'une multitude de contrats, passés sur le marché, entre individus. En présence de coûts de transaction, il y a donc un arbitrage entre organiser au sein d'une firme une activité économique et faire appel au marché. Coase en déduit une première implication relative à la taille d'une firme (partie IV) : la firme arrête de s'étendre lorsqu'il devient plus coûteux, à la marge, d'organiser une activité que de faire appel au marché. Mais l'analyse est plus subtile qu'une simple opposition firme/marché. Fondamentalement, ce qui différencie la firme du marché, c'est la nature des arrangements contractuels existant entre les individus. Alors que, sur le marché, les contrats sont complets et parfaitement déterminés, au sein de la firme les contrats sont incomplets et ouverts. Un contrat de travail, par exemple, ne détermine pas toutes les tâches qu'aura à effectuer l'employé (partie V). L'analyse du système économique passe non seulement par l'étude des relations de marché, mais aussi par celle de ces différents arrangements contractuels et de leur justification économique.
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Écrit par
- Samuel FEREY : enseignant-chercheur à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne
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