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LA NATURE EXPOSÉE (E. De Luca) Fiche de lecture

La parole contraire

Ce roman aux thèses multiples est, de plus, exalté par le « récit théologique » qui l’enclave : les réflexions du narrateur non-croyant sont constamment enrichies par les points de vue des personnages qu’il rencontre, emblématiques des trois grandes religions monothéistes : la foi catholique du curé qui voit dans la restauration de la nudité du Christ en croix une suprême leçon d’humilité et de compassion ; la méditation biblique et l’exégèse de la langue hébraïque par l’entremise du rabbin qui éclaire le sens des inscriptions sur la statue ; la générosité de l’ouvrier musulman qui lui offre le marbre. Ces dialogues interreligieux émaillent la trame narrative d’aphorismes qui illustrent un idéal d’humanité réconciliée.

On peut lire La Nature exposée comme un roman à plusieurs fonds. Le style dénudé et vif, le puzzle des intrigues subtilement enchevêtrées, les personnages emblématiques, l’art du dialogue servent une méditation autour de l’escalade et de l’écriture, de la sculpture et de la création artistique, du corps humain, de la crucifixion du Christ, de la persécution du peuple juif, de la Bible et du Coran, ou encore du sort réservé aux plus petits. Dans ce roman allusif, Erri De Luca use de la littérature non comme d’un simple divertissement mais comme d’une « parole contraire », au service de l’humanisme solidaire qu’exprime son personnage-narrateur. C’est que le romancier lui aussi est un artiste engagé et un passeur de fraternité universelle.

— Yves LECLAIR

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Écrit par

  • : professeur agrégé, docteur en littérature française, écrivain

Classification

Média

Erri De Luca - crédits : Roberto Serra/ Iguana Press/ Getty Images

Erri De Luca