Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

LA NAUSÉE, Jean-Paul Sartre Fiche de lecture

Une rédemption par l'art ?

Dans La Nausée, tout semble tourner autour d'un individu qui occupe le centre du texte. Cet individualisme forcené sera bientôt abandonné par Sartre, tant dans ses textes philosophiques (L'Être et le néant) que dans ses romans (Les Chemins de la liberté) ou ses textes autobiographiques (Les Mots). Sartre s'efforcera de montrer dans Qu'est-ce que la littérature ? (1948) les limites du « réalisme subjectiviste » dont relève encore son roman.

Toutefois, il faut remarquer que l'auteur et le narrateur tendent à confondre leur identité. Bien souvent, Roquentin semble être le porte-parole de Sartre philosophe alors en pleine recherche, malgré tous les efforts stylistiques pour multiplier les effets de distinction entre le « moi » et la « conscience ». L'impasse où Roquentin semble acculé n'aboutit ni au désespoir ni au suicide, pas plus qu'à la révolte, comme chez Camus. Le « salut » parvient d'un air de jazz entendu dans un café et qui joue un rôle quasi rédempteur : « Derrière l'existant qui tombe d'un présent à l'autre, sans passé, sans avenir, derrière ces sons qui, de jour en jour, se décomposent, s'écaillent et glissent vers la mort, la mélodie reste la même, jeune et ferme. » Le monde répugnant, « gluant », « obscène » des choses (auquel même le visage d'autrui ne saurait échapper) n'a pas le dernier mot. Il appartiendra à l'œuvre future de Sartre, tant philosophique que romanesque, de chercher à ouvrir les difficiles « chemins de la liberté ».

— Francis WYBRANDS

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Médias

Jean-Paul Sartre - crédits : AKG-Images

Jean-Paul Sartre

Simone de Beauvoir et Jean-Paul Sartre - crédits : Keystone/ Hulton Archive/ Getty Images

Simone de Beauvoir et Jean-Paul Sartre

Autres références

  • ROMAN - De Balzac au nouveau roman

    • Écrit par
    • 5 088 mots
    • 3 médias
    La Nausée était un grand livre, à peine un roman, plutôt le compte rendu d'une expérience philosophique : la découverte d'une existence qui déborde, de toutes parts, l'esprit. Sartre, en même temps, dénonçait le romanesque : « Quand on vit, il n'arrive rien. Les décors changent, les...
  • SARTRE JEAN-PAUL (1905-1980)

    • Écrit par et
    • 8 894 mots
    • 2 médias
    ...empêcher qu'elle n'érige son unité de fait en une unité de droit. Car il n'y a jamais légitimité de l'expérience ou de l'existence. C'est là l'intuition centrale de La Nausée (1938), celle de la contingence, dont en-soi et pour-soi, dans la déstabilisation asymétrique qu'ils...