LA NUIT DU CHASSEUR, film de Charles Laughton
La Nuit du chasseur (The Night of the Hunter) est le seul et unique film de Charles Laughton (1899-1962) en tant que réalisateur. Comédien réputé, il interprète notamment Henry VIII dans le film d'Alexander Korda (1935), l'intransigeant capitaine Bligh dans Les Révoltés du Bounty (Mutiny on the Bounty, 1935, Frank Lloyd), un savant fou dans L'Île du docteur Moreau (Island of Lost Souls, 1932, Erle C. Kenton) ou encore un vieil avocat misogyne dans Témoin à charge (Witness for the Prosecution, 1958, Billy Wilder). Sa carrière est exceptionnelle, tant au cinéma, où il est dirigé par les plus grands réalisateurs (Stanley Kubrick, Otto Preminger, Alfred Hitchcock, Jean Renoir...), qu'au théâtre. À cinquante-cinq ans, il adapte à l'écran le roman pastoral La Nuit du chasseur (1943) de Davis Grubb. L'histoire est replacée dans le contexte de la grande dépression économique des années 1930 et dans le cadre d'une Amérique rurale. Le film fait aussi écho aux nombreuses conférences bibliques de Charles Laughton données à la radio dans les années 1950 sur le thème du péché originel. Mal apprécié à sa sortie, il deviendra rapidement un film de légende, dont la poésie noire et mystérieuse continue de hanter les salles d'art et essai.
Un film crépusculaire
Pour échapper à la misère, Ben Harper tue un homme et lui vole 10 000 dollars. Il confie l'argent à ses jeunes enfants John, âgé de neuf ans, et Pearl, sa fille de cinq ans, qui jurent de garder le secret. Le ventre de la poupée de Pearl servira de cachette au butin. En prison, il partage sa cellule avec Harry Powell, un faux pasteur qui découvre une partie du secret de ce père sur le point d'être pendu. Libéré, le prêcheur rôde autour de la maison pour y récupérer le trésor. Usant de toutes les perfidies, il épouse la veuve et adopte ses enfants auxquels il impose une stricte morale puritaine tout en cherchant à les séduire sur un mode sournois. À l'issue d'une nuit d'épouvante, où le garçon découvre dans la rivière Ohio le cadavre de sa mère assassinée par Powell, les enfants s'enfuient en barque, poursuivis par le pasteur aux mains tatouées : Love pour la droite, Hate pour la gauche. Au terme d'un long périple, les enfants sont recueillis et défendus par une vieille fermière, Rachel Cooper. Celle-ci symbolise le dernier rempart du bien face à l'expansion du mal. Vaincu à force de prières et démasqué, le faux prêcheur est arrêté. Cette ultime scène replace John dans le contexte de l'arrestation de son père ; très agité par ce pénible souvenir, il finit par délivrer son secret en jetant la poupée qui s'éventre et exhibe aux yeux de tous les billets volés.
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Écrit par
- Kristian FEIGELSON : maître de conférences, sociologue à l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle
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