LA PROMENADE AU PHARE, Virginia Woolf Fiche de lecture
Une nouvelle poétique romanesque
À l'architecture solidement charpentée du livre répondent la légèreté et la grâce d'une écriture poétique et musicale, non dénuée d'humour, et d'une fluidité sans pareille. En attestent les multiples changements de points de vue narratifs, les subtiles modulations du style indirect au style direct, les écarts temporels, à peine perceptibles. La primauté accordée par le peintre, dont l'œuvre est manifestement une métaphore du livre en train de s'écrire, à l'équilibre interne de la composition, à l'alternance de l'ombre et de la lumière, au choix des couleurs, illustre l'intérêt porté par Virginia Woolf à la nouvelle esthétique post-impressionniste, représentée par le « Groupe de Bloomsbury » qui réunissait notamment autour de Virginia Woolf les peintres Roger Fry et Duncan Grant, le critique Clive Bell qui avait épousé Vanessa, la sœur de Virginia.
Reste la signification du phare qui donne son titre au roman. On y verra moins un symbole en relief (phallique, donc) qu'en creux, sorte de place laissée vacante, offerte à l'interprétation et à l'imaginaire de chacun. Cet imaginaire, qui s'investit également dans la lecture, quoique de manière contrastée – Mr. et Mrs. Ramsay ne lisent pas les mêmes livres – a partie liée avec le désir, qui n'est pas l'apanage du petit James devenu grand. La lumière clignotante du phare pointe vers un profond sentiment de plénitude, sur fond d'absence. Rétrospectivement, il paraît difficile de concevoir, pour l'artiste comblée dans son désir d'œuvre, consommation plus achevée.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Marc PORÉE : professeur à l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle
Classification
Média