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LA RABOUILLEUSE, Honoré de Balzac Fiche de lecture

Balzac, Nadar - crédits : Nadar/ Hulton Archive/ Getty Images

Balzac, Nadar

De tous les grands romans de Balzac (1799-1850), La Rabouilleuse est peut-être un des plus méconnus. Il s'agit pourtant d'une œuvre de complète maturité, strictement contemporaine de l'Avant-Propos dans lequel l'auteur explique le titre et le dessein de La Comédie humaine, dont elle reprend plusieurs des thèmes fondamentaux. L'ouvrage était primitivement conçu comme un simple récit provincial : Le Bonhomme Piedefer. Mais au cours de la rédaction, de par l'importance des personnages qu'elle mettait en scène, la partie parisienne qui devait en être le bref préambule déborda le projet initial jusqu'à devenir un roman dans le roman. Aussi, bien que rangée parmi les Scènes de la vie de province, l'œuvre a-t-elle une dimension tout autre que Pierrette ou Le Curé de Tours avec lesquelles elle forme le groupe des Célibataires.

La première partie du roman, Les Deux Frères, parut en février 1841. La seconde, Un ménage de garçon en province, en octobre 1842 ; toutes deux sous forme de feuilleton dans La Presse. Le roman-feuilleton est alors très en vogue et connaît avec Les Mystères de Paris d'Eugène Sue son premier chef-d'œuvre. S'il ne se pliera jamais facilement aux contraintes du genre, Balzac s'efforce néanmoins d'y adapter son récit par des rebondissements, des paroxysmes et parfois une certaine outrance de ton. Mais le découpage préalable en trente-six épisodes ne nuit pas à la cohérence de l'ouvrage, qui raconte l'histoire d'une famille de la Révolution à la fin de la Restauration.

Le mauvais fils

Le docteur Rouget, notable d'Issoudun, a épousé Mademoiselle Descoings, fille de riches commerçants. Deux enfants sont nés : Jean-Jacques, « stupide en tout point », et Agathe, plus jeune de dix ans que son frère, et qui ne ressemble ni à sa mère ni à son père ; doutant de sa paternité, son père l'éloigne en l'envoyant à Paris dans la famille Descoings. On est alors en 1792. Agathe se marie au chef de bureau Bridau qui se tue à la tâche pour l'Empereur. Il meurt précocement en 1808, laissant à sa veuve deux fils : Philippe, blond aux yeux bleus comme sa mère, un « petit gaillard », et Joseph, laid, brun et taciturne. Ce dernier se découvre un don pour la peinture, au grand dam de sa mère qui voit là un « état de va-nu-pieds ». Philippe, lui, s'engage dans la Grande Armée et devient vite capitaine et officier d'ordonnance de l'Empereur.

Survient Waterloo. Le jeune officier, devenu demi-solde, ne s'adapte pas à la vie civile et sombre dans la débauche. Il vole et ruine peu à peu sa famille à cause de ses dettes de jeu, allant jusqu'à dérober le pécule que sa grand-tante Descoings comptait miser à la loterie ; n'ayant pu jouer la combinaison qui s'avère gagnante, celle-ci meurt de commotion. Agathe expulse son fils qui s'enfonce un peu plus dans la déchéance. Ayant trempé dans un complot contre le roi, il risque la prison. Pour sauver l'honneur des Bridau, Agathe décide de faire appel à son frère Jean-Jacques.

Celui-ci est resté à Issoudun, où il habite la maison paternelle. Proche de la sénilité, il est devenu le serviteur de sa servante, Flore Brazier, une paysanne que le père Rouget avait adoptée lorsqu'il l'avait aperçue, enfant, en train de « rabouiller », mot berrichon qui désigne l'action de faire des remous dans l'eau pour attraper les écrevisses. Devenue désormais une « belle commère », elle a pour amant Maxence Gilet, lui aussi ancien officier d'Empire et chef des « Chevaliers de la Désœuvrance », bande de jeunes oisifs qui, par leurs exactions, terrorisent Issoudun, « ville qui aurait engourdi Napoléon ». Les deux amants n'ont de cesse de s'emparer de la fortune de Rouget.

Venus récupérer une part de leur héritage, Agathe et Joseph[...]

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Écrit par

  • : agrégé de lettres modernes, ancien élève de l'École normale supérieure

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Balzac, Nadar - crédits : Nadar/ Hulton Archive/ Getty Images

Balzac, Nadar

Autres références

  • BALZAC HONORÉ DE (1799-1850)

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    ...Romancier de l'affrontement des forces sauvages, déchaînées aussi bien sur les arènes publiques que dans le secret des demeures, de Paris ou de la province, Balzac est aussi un grand romancier du secret des cœurs et des âmes. Combien, dans La Comédie humaine, de « scènes ensevelies dans les mystères de la...