LA SCIENCE NOUVELLE, Giambattista Vico Fiche de lecture
Il n'est pas excessif de prétendre qu'avec Les Principes d'une science nouvelle relative à la nature commune des nations publiés en 1725, puis profondément remaniés en 1730 et 1744, par le Napolitain Giambattista Vico (1668-1774), c'est l'histoire qui fait sa véritable entrée en philosophie. Que les hommes accomplissent leur histoire, de la même façon que Dieu a fait la nature, cette proposition devenue banale était à l'époque difficilement compréhensible. Pour Vico, tout, dans les affaires humaines, est issu de processus qu'il faut décrire et interpréter. L'histoire se répète selon des cycles qui permettent de lire toutes les civilisations selon un modèle semblable. La « métaphysique des poètes » définit l'espace qui autorise à décrire la logique qui préside aux développements de l'humanité. La leçon ne sera pas oubliée : Herder, Hegel et, en France, Michelet (il traduira en 1827 un abrégé de l'œuvre sous le titre significatif de Principes de la philosophie de l'histoire), plus tard Joyce dans son Finnegans Wake (1939), qui est aussi une histoire de l'humanité, sauront faire fructifier les intuitions d'un penseur que l'attention des modernes aux mythes a remis à l'ordre du jour.
Une philosophie de l'histoire
Alors que dans l'histoire de la nature règne l'instinct, aveugle et infaillible, dans l'histoire de l'homme c'est l'intelligence, gage d'une certaine liberté mais aussi d'erreurs et d'illusions, qui préside. Initiateur d'une « philosophie de l'histoire », Vico veut fonder une « science nouvelle ». Pour cela il va chercher, à partir d'une enquête empirique fort documentée mettant en évidence leurs différences culturelles (religions, langues, mœurs, mentalités...), les structures invariantes présidant aux évolutions non isochrones des « nations » historiquement apparues. La table chronologique divise l'histoire en trois âges, celui des dieux, des héros et des hommes, et présente un tableau qui va du déluge à la seconde guerre punique. Ce que Vico entend par « science » est plus proche de la conception d'un Bacon que de celle d'un Descartes : pour lui, la méthode dépend des objets à analyser, et l'induction est plus respectueuse des phénomènes que la déduction chère aux « géomètres ». Théorie et pratique doivent être séparées, et « c'est vouloir déraisonner avec la raison » que d'appliquer une même méthode aux deux domaines. Ce que l'on appellera bien plus tard « sciences humaines » acquiert ainsi ses premiers fondements scientifiques, même s'il faudra attendre les recherches de Dilthey pour les voir reconnues par les philosophes. Pour Vico, l'unification des savoirs, malgré le souci de cohérence, voire de systématicité « circulaire » – selon les belles analyses de son excellent traducteur en français, Alain Pons – constamment réaffirmé, ne peut se faire contre la complexité des objets à examiner.
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Écrit par
- Francis WYBRANDS : professeur de philosophie
Classification
Autres références
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PROGRÈS
- Écrit par Bernard VALADE
- 8 628 mots
- 2 médias
...pour le bien public », les conditions premières d'un état futur de bonheur. Comme Fontenelle, l'abbé a cru à la marche ascensionnelle de l'humanité. Mais Vico, dans La Scienza nuova (1725-1730), a montré que la variété infinie des faits humains présente toujours les mêmes traits, les mêmes caractères,... -
VICO GIAMBATTISTA (1668-1744)
- Écrit par Alain PONS
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...sapientia) expose la métaphysique vichienne sous sa première forme. La forme définitive sera élaborée à partir d'une réflexion sur le droit. Le Droit universel (Diritto universale, 1720-1721-1722) annonce déjà les thèmes principaux de la grande œuvre de Vico, la Scienza nuova, dont la première...