LA TRAGÉDIE DU ROI CHRISTOPHE, Aimé Césaire Fiche de lecture
Drame et bouffonnerie
Cette fresque shakespearienne juxtapose les affrontements dramatiques et les scènes burlesques. Le succès obtenu auprès des publics les plus divers montre son efficacité. Particulièrement en Afrique : sa représentation, lors du festival des Arts nègres de Dakar en 1966, a suscité l'enthousiasme du public populaire, au point d'éveiller la méfiance des autorités. Dans plusieurs pays, la pièce fut victime d'une censure plus ou moins sournoise.
C'est que Césaire montre un terrible autocrate, cousin de ceux que l'on a vu sévir dans l'Afrique décolonisée. Son portrait du despote tropical est d'une lucidité et d'une virulence impitoyables. Il serait pourtant simpliste de réduire Christophe à cette dimension de pantin ubuesque. Césaire lui-même a souligné l'ambivalence du personnage : « Il y a chez lui du Prométhée, du Pierre le Grand, du Bourgeois gentilhomme. » Et surtout Christophe est toujours dédoublé par le personnage d'Hugonin, sorte de fou du roi, parasite et vaudouisant, qui lui tend le miroir de sa bouffonnerie. Où est le véritable Christophe ? Dans sa monstruosité de tyran ? Ou dans sa prise de conscience que la liberté et l'indépendance imposent de terribles exigences : « Je demande trop aux hommes ! Mais pas assez aux Nègres, Madame. [...] C'est d'une remontée jamais vue que je parle, Messieurs, et malheur à celui dont le pied flanche. » La Tragédie du roi Christophe est-elle celle d'une impossible décolonisation ?
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Écrit par
- Jean-Louis JOUBERT : professeur à l'université de Paris-XIII
Classification
Média
Autres références
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CÉSAIRE AIMÉ (1913-2008)
- Écrit par Jean-Louis JOUBERT
- 1 409 mots
- 1 média
Le chef-d'œuvre de Césaire, La Tragédie du roi Christophe (1963), représenté dans le monde entier, prend son sujet dans un épisode de l'histoire haïtienne, le destin de Christophe, « ancien esclave, ancien cuisinier, ancien général, roi d'Haïti ». Cette didascalie résume tout l'enjeu de la tragédie...