LA TRILOGIE, Naghib Mahfuz Fiche de lecture
Une interrogation sur l'histoire de l'Égypte
Pour expliquer son projet littéraire, qui marque non seulement La Trilogie mais aussi toute son œuvre, Naguib Mahfouz a souvent évoqué la soirée de l'année 1938 durant laquelle il prit la décision de consacrer le reste de son existence à l'écriture, avec pour objectif suprême de contribuer à la totale reconnaissance du genre romanesque au sein du paysage culturel arabe. Une mission qui montre à quel point le peintre de l'Égypte naissant à sa modernité a toujours possédé une conscience aiguë de sa propre position historique. En effet, Naguib Mahfouz appartient à une génération de transition – celle de Kamal, fils d'Amina et du terrible Abd el-Gawwad, frère de Fahmi, le martyr du combat national, oncle des deux jeunes révoltés qui ont choisi des voies si opposées. Dans l'immense cortège de tous ses personnages, c'est en effet de Kamal que le romancier a souvent affirmé se sentir le plus proche. C'est lui qui, dans le récit, ne réussit pas totalement à marquer la coupure qui le sépare de son père, et qui donne à La Trilogie cette conclusion en demi-teinte : le constat de l'impossible unité de l'être, la persistance de l'interrogation anxieuse sur le sens de l'existence. Cette inquiétude, les œuvres postérieures de Naguib Mahfouz l'exprimeront selon des stratégies narratives qui, rompant avec l'écriture naturaliste, ouvrent ce que l'on peut appeler, à la suite de Nathalie Sarraute, « l'ère du soupçon » dans le roman arabe.
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Écrit par
- Yves GONZALEZ-QUIJANO : maître de conférences à l'université de Lyon-II-Lumière, chercheur associé au Gremmo-Maison de l'Orient
Classification
Média
Autres références
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MAHFOUZ ou MAHFŪZ NAGUIB (1911-2006)
- Écrit par Luc-Willy DEHEUVELS
- 2 007 mots
- 1 média
Après al-Sar̄ab (Chimères, 1948) et Bid̄aya wa nih̄aya (Vienne la nuit, 1949), cette séquence de romans citadins culmine avec Bayna l-Qasrayn (Impasse des Deux-Palais, 1956), Qasr al-Chawq (Le Palais du désir, 1957) et al-Sukkariyya (Le Jardin du passé, 1957). Ces trois romans, écrits...