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LA VIE DE GALILÉE (mise en scène J.-F. Sivadier)

<em>La Vie de Galilée</em>, de Bertolt Brecht - crédits : D. Brillault/ TNB

La Vie de Galilée, de Bertolt Brecht

À l’été 2002, Jean-François Sivadier triomphait au festival d’Avignon. Quelques mois seulement après l’avoir créée au Théâtre national de Bretagne, à Rennes, il présentait sa mise en scène de La Vie de Galilée. Jouée tambour battant à la manière du théâtre de tréteaux, cette œuvre testamentaire (la troisième version établie par Brecht date de 1955, soit un an avant sa mort), réputée bavarde, austère, retrouvait une jeunesse nouvelle, joyeuse et insolente, ce qui n’interdisait ni la gravité ni la profondeur. Le succès fut tel que le spectacle, applaudi en tournée à travers toute la France, fut de nouveau mis à l’affiche du festival l’année suivante. Treize ans après, c’est ce même spectacle de haute mémoire qu’a repris Jean-François Sivadier au Monfort-Théâtre à Paris. L’aventure est assez rare en France pour être relevée. On pouvait craindre l’usure du temps. Vaine inquiétude : l’éblouissement est le même, l’enchantement intact.

Une fête de l’intelligence

Réinstallée dans son décor d’origine – des lattes de bois clair reconstruisant en permanence l’espace alors que, sur le côté, une petite table avec miroir à maquillage fait office de coulisses apparentes –, la mise en scène n’a rien perdu de sa fluidité, de son allégresse, de sa vitalité. Elle est plus fidèle que jamais à l’esprit d’un Brecht qui, s’il se faisait le héraut d’un théâtre du sens et de la réflexion, n’en exigeait pas moins qu’il fût aussi celui du plaisir et de l’émotion.

Dès la première scène, le ton est donné : par le biais d’un inénarrable jeu de devinettes mimées, Galilée s’évertue à prouver à un enfant que la théorie d’Aristote sur les planètes est caduque, que le Soleil ne tourne pas autour de la Terre, mais que c’est bien elle qui tourne autour de celui-ci. La suite n’est que fête de l’intelligence, un feu d’artifice continu. Inventions et trouvailles, images réjouissantes, poétiques et naïves répondent, en écho, aux discours et disputes sur la science, son statut, sa fonction, comme sur la responsabilité de l’homme de science face à l’humanité et à ceux qui la dirigent. Ici, c’est un mobile illustrant la rotation des satellites autour de Jupiter, suspendu dans les airs comme au plafond d’une chambre d’enfant ; là, c’est un prélat qui défend l’ordre établi du vieux monde, accroché à un ballon gros comme un globe terrestre, s’élevant dans le ciel… La question de la « distanciation » brechtienne se règle d’elle-même, alors que le public, pris au jeu des adresses directes, devient partie prenante du spectacle. Ainsi, lors d’un intermède clownesque au cours duquel Galilée, affublé d’un nez rouge, s’interroge – et l’interroge – sur le savoir et le doute, évoquant tout à trac Berlusconi, Sarkozy, ou Igor et Grichka Bogdanov…

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Écrit par

  • : journaliste, responsable de la rubrique théâtrale à La Croix

Classification

Média

<em>La Vie de Galilée</em>, de Bertolt Brecht - crédits : D. Brillault/ TNB

La Vie de Galilée, de Bertolt Brecht