LAGRANGE ALBERT, en religion MARIE-JOSEPH (1855-1938)
Né à Bourg-en-Bresse, Albert Lagrange s'orienta d'abord vers les études de droit. En 1878, il entra au séminaire d'Issy, puis chez les dominicains à Saint-Maximin (1879). Prêtre en 1883, chargé de divers enseignements aux jeunes de son ordre, détaché ensuite à Vienne (Autriche) pour y étudier les langues orientales (1888), il fut envoyé à Jérusalem (1890), où se déroula toute sa carrière scientifique, vouée à la fois à l'enseignement et à la recherche.
Il créa d'abord l'École pratique d'études bibliques au couvent dominicain de Saint-Étienne, fondé depuis peu à Jérusalem. Tout de suite, le père Lagrange en fut le directeur et le principal professeur, en attendant d'y introduire une équipe de disciples et de collaborateurs. Il ne la quitta qu'exceptionnellement ; en 1912 pour un exil de quelques mois et pendant la guerre de 1914-1918. En 1921, l'École biblique fut officiellement reconnue comme École archéologique française de Jérusalem ; lorsque sa santé obligea Lagrange à la quitter définitivement en 1935, la relève était assurée.
Il créa en 1892 la Revue biblique, qui, pendant plus de quarante ans, porta au public savant l'écho des travaux de son fondateur et de ses collaborateurs. Elle ne fut jamais interrompue, et sa collection de quelque quatre-vingts volumes constitue un panorama de l'exégèse scientifique pendant plus de trois quarts de siècle. En 1900, il lança la collection des Études bibliques qui, ouverte à tous les savants de foi catholique et destinée à former « un commentaire complet de l'Écriture sainte », accueillit bientôt également des études plus synthétiques. Des quelque cinquante volumes qu'elle comprenait à la mort du père Lagrange, dix-sept sont signés de son nom. Il commença par un commentaire, Le Livre des Juges (1903), mais dut renoncer à publier La Genèse (1905). Après les Études sur les religions sémitiques (1903) et Le Messianisme chez les Juifs (~ 150 à 200), il s'orienta vers le Nouveau Testament, publiant successivement L'Évangile selon saint Marc (1911), L'Épître aux Romains (1916), L'Épître aux Galates (1918), L'Évangile selon saint Luc (1921), L'Évangile selon saint Matthieu (1923), L'Évangile selon saint Jean (1925), puis, destiné à un plus large public, L'Évangile de Jésus-Christ (1928). Après Le Judaïsme avant Jésus-Christ (1931), il entreprit encore d'écrire une Introduction à l'étude du Nouveau Testament, dont il donna trois volumes : Histoire ancienne du canon du Nouveau Testament (1933), Critique textuelle : la critique rationnelle (1935), Critique historique : les mystères (1937). Ce fut son dernier livre. Retiré à Saint-Maximin depuis 1935, le père Lagrange y mourut.
Le seul catalogue de ses publications ne permet guère de deviner les combats que dut soutenir le père Lagrange. À une époque où le rationalisme semblait présider à toute étude scientifique de la Bible, beaucoup parmi les catholiques jugeaient téméraire sa prétention d'étudier les Livres saints de première main, avec la rigueur de la critique et toutes les ressources de la linguistique, de l'histoire orientale, de l'archéologie. Son petit livre sur La Méthode historique surtout à propos de l'Ancien Testament (1903), considéré à juste titre comme un programme, fut âprement discuté. Certains affectèrent de confondre son effort avec celui d'Alfred Loisy, qui, à la même époque, tirait de méthodes analogues des conclusions destructrices de la foi. Le père Lagrange protesta toujours contre les insinuations malveillantes et défendit son œuvre tout en se soumettant à l'autorité de l'Église et aux décisions de ses supérieurs. La publication récente de ses souvenirs a mis en évidence sa parfaite loyauté.
En fait, si une mise en garde d'une congrégation[...]
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Écrit par
- Paul AUVRAY : professeur au scolasticat de l'Oratoire
Classification
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