LAMPRIS GUTTATUS
Encore appelé « opah » ou « saumon des dieux » en Polynésie française, le lampris royal (Lamprisguttatus) est un poisson coloré pouvant atteindre deux mètres de longueur pour un poids de 270 kilogrammes (la longueur moyenne étant de 1,20 m). De forme presque circulaire, il se rencontre dans tous les océans tropicaux et tempérés, où il évolue dans les zones épipélagique et mésopélagique en agitant ses grandes nageoires pectorales en forme d’ailes.
Nicholas Wegner et son équipe, de la National Oceanic and Atmospheric Administration américaine (N.O.A.A.), ont publié en 2015 une étude (« Whole-body endothermy in a mesopelagic fish, the opah, Lamprisguttatus », in Science, vol. 348, no 6236, pp. 786-789) qui révèle que cette espèce de poisson est capable de produire et de conserver une température corporelle plus élevée que celle de son environnement, une propriété généralement attribuée aux mammifères et aux oiseaux.
Animaux homéothermes et poïkilothermes, endothermes et ectothermes
La plupart des mammifères et des oiseaux gardent leur température corporelle à peu près constante : on dit qu’ils sont homéothermes. Ils sont aussi capables de produire de la chaleur grâce à leur activité métabolique : on dit qu’ils sont endothermes. Au contraire, les amphibiens et les reptiles, dans leur grande majorité, ont une température corporelle qui varie avec la température extérieure : ils sont poïkilothermes. Ils se réchauffent en s’exposant au soleil : ils sont ectothermes. Ainsi, on qualifie les mammifères et les oiseaux d’animaux « à sang chaud » et les amphibiens et les reptiles d’animaux « à sang froid ». Pourtant, la production de température interne et la conservation d’une température constante sont deux phénomènes bien distincts. On connaît ainsi des mammifères endothermes qui sont capables de faire baisser leur température, comme les chauves-souris, et des animaux ectothermes qui conservent une température corporelle constante, comme probablement certains dinosaures dans le passé.
Les poissons, un terme sans valeur scientifique qui regroupe essentiellement les Chondrichtyens (chimères, raies et requins ; poissons dits cartilagineux) et les Actinoptérygiens (poissons à nageoires rayonnées qui comprennent la vaste majorité des poissons osseux), sont typiquement considérés comme des vertébrés à « sang froid ». On connaît pourtant quelques poissons qui, grâce à leur activité métabolique élevée, sont capables de produire de la chaleur interne. C’est le cas du requin-saumon (Lamnaditropis) et de certains grands poissons pélagiques comme les thons, les marlins et les espadons. Ils élèvent leur température grâce à l’activité de leurs muscles locomoteurs logés au centre de leur corps afin d’éviter une déperdition de chaleur vers l’extérieur. Ces mécanismes réchauffent la région du cerveau et des yeux, des organes qui doivent toujours être fonctionnels. Le reste du corps conserve une température plus basse. Pour minimiser les pertes de température par diffusion, des systèmes d’échange de chaleur sous la forme d’ artérioles et de veinules accolées – les retiamirabilia ou réseaux admirables – permettent le transfert de chaleur des vaisseaux les plus chauds vers les plus froids près des masses musculaires. Mais, chez ces poissons, subsiste le problème des branchies où le sang, très proche du milieu extérieur, se refroidit rapidement.
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Écrit par
- Lionel CAVIN : conservateur du département de géologie et paléontologie au Muséum d'histoire naturelle de la ville de Genève
Classification
Média