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ANDREWES LANCELOT (1555-1626)

De Lancelot Andrewes, un fragment au moins reste dans les mémoires : son évocation, dans un de ces sermons sur la Nativité qu'il prêcha chaque année, entre 1605 et 1624, le 25 décembre devant le roi Jacques Ier et la cour, du voyage des Mages qui avaient vu l'étoile. T. S. Eliot reprendra presque textuellement en 1927 un passage de ces sermons dans son Voyage des Mages. En 1928, il consacre au théologien anglican un essai, For Lancelot Andrewes, et, d'une certaine manière, son œuvre poétique, en particulier la liturgie des Quatre Quatuors, sont une méditation sur la stella prédicantium dont les sermons rythmèrent, dans le style « métaphysique » du temps et pendant tout le premier quart du xviie siècle, la vie de la cour d'Angleterre.

Lancelot Andrewes est né en 1555 à Londres d'une famille appartenant à ce milieu marchand et navigateur dont le règne d'Élisabeth Ire allait faire la fortune. 1555, c'est-à-dire le règne (1553-1558) de Mary Tudor, surnommée « Mary la Sanglante », qui donna un coup d'arrêt à la Réformation en Angleterre et entreprit de restaurer le catholicisme d'avant Henri VIII. Le 4 février 1555, le premier « martyr », John Smithfield, est brûlé à Smithfield ; à l'automne, Hugh Latimer, évêque de Worcester, et Nicholas Ridley, évêque de Londres, montent sur le bûcher à Oxford, suivis au printemps de 1556 par Thomas Cranmer, archevêque de Canberbury et principal artisan du Protestant Book of Common Prayer de 1549. Seul l'avènement en 1558 d'Élisabeth remettra l'Église d'Angleterre à la recherche de cette via media qui a fait sa gloire.

Lancelot Andrewes entre à huit ans à l'école de la « corporation des tonneliers », puis à la Merchant Taylors' School qui vient d'être fondée. Il y apprend le latin, le grec, l'hébreu, manifestant déjà cette aptitude aux langues étrangères qui lui fera étudier plus tard l'araméen, le syriaque, l'arabe et une douzaine de langues modernes. C'est en tant qu'helléniste qu'il reçoit une bourse pour Pembroke Hall, à Cambridge, en 1571. Bastion depuis 1520 de la Réforme puis du mouvement puritain en Angleterre, l'université de Cambridge est en 1571 en pleine controverse. Élisabeth Ire essaie de « réduire au silence » les pasteurs du royaume qui ne se conforment pas aux rites de l'Église anglicane et l'année précédente, Thomas Cartwright, pour avoir fait des conférences sur le presbytérianisme, est destitué de sa chaire de théologie par John Whitgift, Master de Trinity et futur archevêque de Canterbury. En 1571 la faction puritaine, sans doute inspirée par Cartwright, lance son « Avertissement au Parlement ». Peut-être est-ce ce contact quotidien avec les puritains qui amènera Andrewes à devenir l'expert qu'il fut en patristique. En 1575 il est Bachelor of Arts, et en 1580 il reçoit les ordres.

Commence alors une brillante carrière ecclésiastique : à la cure de St. Giles, à Londres, Andrewes ajoute deux prébendes, dont l'une à St. Paul's ; il est aumônier de la reine et de l'archevêque de Canterbury, primat de toute l'Angleterre ; il est devenu Master de son collège, Pembroke, et à partir de 1601 il obtient de surcroît le doyenné de Westminster. C'est à ce titre qu'il participe en 1603 aux funérailles d'Élisabeth puis au couronnement de Jacques Ier. Il devient le confesseur du roi. En 1604, il participe à la conférence d'Hampton Court convoquée par Jacques Ier pour recevoir les doléances des puritains. C'est à cette occasion qu'est mis en œuvre le chef-d'œuvre que l'Église anglicane a légué à la littérature anglaise, la version autorisée de la Bible, qui paraît sept ans plus tard, en 1611 : Andrewes fut responsable de l'équipe chargée des douze premiers livres de l'Ancien Testament.[...]

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Écrit par

  • : professeur de littérature américaine à l'université de Paris IV-Sorbonne et à l'École normale supérieure

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