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LAND ART

L'art écologique

Avec le cycle du Lagon, commencé en 1974, les Harrison, actifs dès la fin des années 1960, ont développé un discours écologique à partir de la production de cartes, de photographies de dessins et de textes, créant ainsi une œuvre de très grande dimension (130 m de longueur environ sur près de 2,50 m de hauteur). Cette « fresque » gigantesque, qui a été montrée en 1996 à Paris lors de l'exposition Villette-Amazone, doit être perçue, selon eux, comme une « narration environnementale ».

En 1962, une biologiste, Rachel Carson, publie Silent Spring, un ouvrage qui dénonce l'usage de pesticides et ses retombées catastrophiques sur le milieu naturel. Le livre marque les esprits mais l'heure n'est pas encore à la mobilisation dans ce domaine, et son impact hors des milieux intellectuels et artistiques reste limité. Aux États-Unis, on peut faire remonter la pensée environnementaliste au xixe siècle, avec Henry David Thoreau, et au transcendantalisme. John Muir, le fondateur en 1892 de la première association écologiste américaine, le Sierra Club, et Aldo Léopold, l'auteur de l'Almanach d'un comté des sables (1949), en sont les inspirateurs les plus connus. Mais l'harmonie qu'ils prônent avec la nature n'a pas encore pris la dimension d'un projet social. Alan Sonfist, très tôt préoccupé d'écologie, tentera ainsi de reconstituer au sud de Manhattan, sur une surface d'une centaine de mètres carrés, le biotope du site avant l'arrivée des colons en se faisant aider de divers chercheurs qui lui ont ainsi permis, en 1965, de réaliser cette reconstitution à laquelle il donnera le nom de Time Landscape. C'est dans ces années-là, en effet, que naît l'idée d'un art écologique, dont l'exposition Ecological Art (mai-juin 1968) à la John Gibson Gallery de New York annonce les prémices. Il faudra néanmoins attendre les années 1970-1980 pour que les pratiques artistiques se soucient véritablement d'écologie.

En 1982, lors de la Documenta 7, Joseph Beuys plantera 7 000 chênes à Kassel, en Allemagne, et créera en même temps un parti vert. La même année Agnes Denes réalisera une intervention, connue sous le nom de Wheatfield-A Confrontation, à Battery Park, au sud de Manhattan, en semant du blé sur ce qui était alors un immense terrain vague de près de 8 000 mètres carrés. Elle le moissonnera quelques mois plus tard et mettra ainsi en évidence l'opposition entre les gestes simples, qui permettent à un sol pollué de redevenir cultivable, et les arbitrages économiques complexes en matière agroalimentaire de l'une des places financières les plus puissantes du monde. Dès les années 1980, Hermann Prigann mettra toute son énergie à dénoncer les ravages de l'industrie polluante à travers d'imposantes sculptures, qui empruntent souvent aux formes de l'art mégalithique. Plus récemment, l'artiste Mel Chin a commencé à travailler, avec le scientifique Rufus Chaney, à la mise au point d'un site de dépollution naturelle en utilisant des techniques de « phytoremediation » grâce à la sélection de plantes capables d'absorber du cadmium et autres déchets industriels toxiques. Ce premier Revival Field (1990), ainsi qu'il nomme cette œuvre, a connu depuis plusieurs versions.

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  • : agrégé de philosophie, docteur en philosophie, maître de conférences à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne

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