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MALAYĀḶAM LANGUE & LITTÉRATURE

Une luxuriante littérature moderne

Au xixe siècle, les missions chrétiennes, le régime britannique et les rāja de Cochin et du Travancore développent l'éducation anglaise, mais aussi les études indigènes, avec ampleur et efficacité, suscitant un public large et réceptif. La prose, attestée depuis le xive siècle, illustrée au xviiie par un étonnant récit de voyage en Europe, est stabilisée à la fin du xixe siècle ; les Veṇmaṇi introduisent en poésie la langue populaire : les lettres malayāḷam ignorent le handicap linguistique d'une tradition artificielle. Elles font leurs gammes dans d'innombrables traductions du sanskrit, de l'anglais, et, à travers l'anglais, des langues européennes ainsi que des autres langues indiennes. Cette activité se poursuit au cours du xxe siècle avec plus d'ampleur. Enfin les œuvres de création naissent dans un milieu cultivé où foisonnent les œuvres critiques : histoire littéraire ou sociologique (illustrée par Kavalam Madhava Paṇikkar), recherche linguistique, biographies ou voyages, essais. La brillante contribution du Kēraḷa à la littérature sanskrite du passé se prolonge par son rôle actif dans les études critiques sanskrites. Les journaux, depuis la fin du xixe siècle, publient les meilleurs écrivains. Ceux-ci bénéficient de nombreuses associations.

En poésie, à côté des néo-classiques à la phraséologie abondante et des timides audaces romantiques, trois poètes imposent un accent nouveau : Kumāra, Āśān (1873-1924), de Nalini (1911), amour érotique, à Karuna (1925), amour métaphysique ; Valḷatōl (1879-1958), nationaliste idéaliste, sensible à toutes les injustices et inspiré par toutes les idéologies (Marie-Madeleine) ; et Uḷḷūr Parameśvara Iyer (1877-1949), savant historien des lettres, philosophe spiritualiste. Dans la génération suivante, citons G. Sankara Kurup (1901-1978) et Caṅṅampuḷa (1914-1948). Depuis 1936, un mouvement progressiste orienté « à gauche », en même temps qu'il diffusait un message politique, reprenait à son compte les aspirations traditionnelles (Pala Narayana Nair). Avec Indulekha (1889), Candu Mēnon inaugure le roman social et C. V. Raman Pillai le roman historique avec Martanda Varma (1891). Préférant le réalisme et parfois l'agressivité politique au romantisme ou à la littérature psychologique, le genre a proliféré : mille cinq cents titres et des milliers de nouvelles. Basheer se signale par un mélange d'humour délicat et d'audace dans les thèmes, Kesavadev par sa peinture des miséreux et ses appels passionnés pour une révolution sociale, et enfin Takaḷi par l'art avec lequel il a su transcender la peinture des plaies sociales qu'il dénonce, de Deux Mesures de riz (1948), drame du prolétariat paysan, à Crevettes (Chemin, 1956), tragédie se déroulant dans une communauté de pêcheurs d'Allepey.

Sur les mêmes thèmes, le théâtre et la radio ont beaucoup produit, cependant l'art ne triomphe pas toujours de l'idéologie. En tout cas, le malayāḷam reste le premier exemple en Inde d'une littérature dont le message adressé à tous est effectivement reçu et discuté par tous.

— François GROS

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Écrit par

  • : agrégé de l'Université, directeur de l'École française d'Extrême-Orient

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