PĀLI LANGUE & LITTÉRATURE
La littérature
Le pāli est essentiellement la langue d'une importante littérature religieuse. Celle-ci comprend, d'abord, les Écritures canoniques, qui passent pour rapporter la Parole, ou l'Enseignement, du Buddha. Le canon aurait été en grande partie recueilli lors du premier concile (à Rājagṛha, Magadha), peu après la mort du Maître (survenue en 543 avant notre ère, selon le theravāda, autour de 480 estiment les savants occidentaux). Quant aux écrits non canoniques, leur composition s'échelonne sur plus de dix siècles. Ce sont des commentaires, à divers degrés, de textes canoniques, des sommes, des résumés ou des manuels, etc. ; des œuvres d'exégèse, des traités de grammaire, voire de médecine ; des poèmes épico-lyriques, transposant la matière des chroniques religieuses.
Les « trois corbeilles »
Les textes essentiels sont naturellement ceux du canon, répartis, dira-t-on plus tard, « en trois corbeilles » (Ti-piṭaka). Elles correspondent aux trois spécialités peu à peu reconnues dans la communauté : « discipline » (vinaya), « texte(s) » de la Loi (sutta, ou sūtra en sanskrit), scolastique (abhidhamma, ou abhidharma, « retour technique sur la Loi »). Or, « tandis que le Vinaya est seulement une convention adoptée comme ligne de conduite, le Dharma exposé dans les Sūtra représente la vérité absolue » : les sūtra constituent « l'héritage commun à toutes les sectes » ; quant à l'Abhidharmapiṭaka, il « apparaît comme la systématisation, poussée dans le détail, des enseignements contenus dans les Sūtra » (Lamotte). Ainsi, l'essentiel de la « Loi » (Dhamma) prêchée par le Buddha est contenu dans le Suttapiṭaka.
Le Suttapiṭaka comprend cinq « corpus », nikāya (dont les autres sectes bouddhiques ont plus ou moins la contrepartie). Le cinquième est quelque peu marginal. Les sutta sont des compositions autonomes, en prose simple où s'insèrent parfois des stances. Beaucoup sont présentés comme des discours du Buddha, en réponse à des interlocuteurs, religieux ou laïcs, qu'il instruit souvent à l'aide d'images et de comparaisons.
Le plus important des quatre premiers recueils est la « Collection des longs », Dīgha-nikāya, trente-quatre sutta, répartis en trois groupes. Ils exposent discursivement les principaux points de la doctrine bouddhique ; ainsi, on y voit opposer l'éthique bouddhique et celle des doctrines rivales, retracer les Grands Exploits qui jalonnent la carrière de tout Buddha, ou encore relater, dans le Mahāparinibbānasutta, la dernière année de la vie du Buddha Gotama, sa « totale extinction » et ses funérailles. Au reste, plusieurs des sujets traités dans le Dīgha se retrouvent dans les autres « corpus ». Ces sermons sont parfois un peu lents pour notre goût, qui en souffre mal les très nombreuses répétitions ; cependant l'enseignement y est clair, humain, et plusieurs ne laissent pas d'être émouvants.
La « Collection des petits », Khuddakanikāya, dont la canonicité a parfois été contestée, compte quinze ouvrages, certains parmi les plus célèbres et, littérairement, les mieux venus de toute la littérature bouddhique. Les Birmans augmentent le recueil de plusieurs œuvres, en particulier des célèbres Questions de Milinda(Milinda-pañha en pāli), « texte classique d'instruction doctrinale » dans la plupart des pays bouddhiques (Jean Filliozat) ; il est plutôt postcanonique.
Il semble que le noyau primitif de ces textes mineurs « ait été formé par des poésies psalmodiées » (Lamotte). Les plus fameux sont des livres de stances, surtout le Dhammapada, « Vers de la Loi », et, plus encore, les Jātaka, « Naissances » antérieures du Buddha, strophes accompagnées d'un « commentaire » en prose, non canonique.
Le Suttanipāta, « Ensemble de textes », regroupe des[...]
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Écrit par
- Colette CAILLAT : professeur à l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle
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