CHAMITO-SÉMITIQUES LANGUES
Structure linguistique
Le système phonique
Le consonantisme est d'une grande richesse. L'état le plus ancien auquel la grammaire comparée permet d'accéder semble avoir comporté vingt-sept phonèmes. Une partie de ces phonèmes est réalisée à des points postérieurs extrêmes de l'appareil phonatoire : voile du palais, pharynx et larynx. Ainsi, les langues chamito-sémitiques attestent l'existence de deux consonnes vélaires, deux pharyngales, deux laryngales. Ces consonnes d'arrière se présentent par paires, avec une sonore (comportant des vibrations des cordes vocales) et une sourde (sans vibrations). Mais pour d'autres consonnes, celles qui s'articulent dans la région comprise entre les dents et la voûte palatine, le système comporte un troisième phonème avec des traits spécifiques, pour chaque point d'articulation. En berbère ou en arabe, la réalisation de ce troisième phonème s'accompagne d'un mouvement de l'arrière-bouche et d'une constriction du pharynx. Dans les langues éthiopiennes, ces phonèmes de la troisième série mettent en jeu une occlusion glottale concomitante à l'articulation propre.
Le système vocalique est pauvre. En tout trois timbres : a, i, u, réalisés sous des quantités longues ou brèves. De très nombreux dialectes arabes, par exemple, fonctionnent avec quatre ou cinq voyelles, tandis que le berbère (à l'exception du parler des Touareg) n'en connaît que trois.
L'énoncé
On peut répartir l'ensemble des formes en trois classes : les verbes, les nominaux, les particules. Dans un énoncé complet (sujet-prédicat), un nominal peut être sujet ou prédicat. Un verbe peut être prédicat d'un sujet nominal ou constituer par lui-même un énoncé complet. Un énoncé a donc toujours l'un des schèmes suivants : N + N ; V + N ; V (N désignant un nominal avec ses expansions, V un verbe avec ses expansions).
Un verbe chamito-sémitique est constitué par un ensemble de thèmes différents fondés sur un même radical. Au thème fondamental, le radical apparaît sous sa forme la plus simple. Mais des augments divers, internes ou externes au radical, permettent de former des thèmes dérivés qui modifient la notion de base. Ces procédés de dérivation sont de deux sortes principales :
– Augmentation interne du radical, en particulier par répétition ou gémination d'un de ses éléments (égyptien h'g, « être joyeux » ; h'g'g, « exulter » ; arabe qatala, « tuer », qattala, « massacrer ») ou par insertion d'un â long après la première consonne radicale (arabe kataba, « il a écrit » ; kâtaba, « il a correspondu avec »).
– Affixation de morphème : par exemple, l'affixation d'un morphème, s, š, k ou ' selon les langues, au thème verbal lui confère une valeur « causative » ou « factitive » : akkadien kanâšu, « se soumettre », suknûšu, « soumettre » ; égyptien nfr, « être beau », snfr, « rendre beau » ; berbère (kabyle) ban, « paraître », sban, « manifester » ; bedja kem, « voir », skem, « montrer ». D'autres affixes, t et n, déterminent une valeur « interne » qui permet des emplois de réfléchi ou de passif.
Chacun de ces thèmes, simple ou dérivé, se conjugue selon un double paradigme par lequel s'exprime l'opposition d' aspect. L'expression du temps situé (présent, passé, futur) est en effet secondaire dans le verbe chamito-sémitique. Celui-ci est fondé, dans les états les plus archaïques connus, sur l'aspect intrinsèque de la notion, selon que l'attention doit être attirée sur le déroulement du procès ou au contraire sur le contenu verbal considéré comme un état durable. En akkadien, par exemple, du verbe balâṭu, « guérir », on tire une forme stative, baliṭ, qui signifie[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- David COHEN : professeur à l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle, directeur d'études à l'École pratique des hautes études, directeur du Centre de littérature et linguistique arabes (C.N.R.S.)
Classification
Autres références
-
AMORRITES ou AMORRHÉENS
- Écrit par Gilbert LAFFORGUE
- 728 mots
Amorrites, ou Amorrhéen, est un nom de peuple que les orientalistes ont tiré du mot akkadien Amourrou, par lequel les Mésopotamiens désignaient la région située à l'ouest de leur pays et aussi ses habitants.
Comme les Amorrites n'ont pas écrit leur langue, nous ne les connaissons que par...
-
ARABE (MONDE) - Langue
- Écrit par David COHEN
- 9 385 mots
- 3 médias
L'arabe est une langue sémitique. Elle appartient génétiquement à la même famille que l'akkadien, l'amorite, l'ougaritique, le cananéen (hébreu, phénico-punique, moabite), l'araméen, le sudarabique et divers idiomes éthiopiens (guèze, amharique, etc.). Mais, au sein de cet... -
ARAMÉENS
- Écrit par R.D. BARNETT
- 1 910 mots
- 1 média
-
ASSYRO-BABYLONIENNE LITTÉRATURE
- Écrit par René LABAT
- 4 630 mots
Cet akkadien qui, sous Sargon, acquiert enfin droit de cité appartient à la famille des langues sémitiques. Il en constitue le rameau oriental, le plus anciennement attesté, et assez isolé des autres. Il doit certainement une part de sa singularité à sa longue et étroite coexistence avec la langue... - Afficher les 14 références