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LAO SHE ou LAOSHE [LAO-CHO](1899-1966)

Aussi à l'aise dans la littérature dite « populaire » (minjian wenxue), que dans la littérature tout court, Lao She est un des rares grands écrivains de la Chine moderne à avoir pratiqué presque tous les genres littéraires. Mais les deux domaines où son sens de l'observation, son humour si particulier et sa maîtrise de la langue se sont le mieux exercés ont été successivement le roman et le théâtre. La disparition de l'auteur du Pousse-pousse au début de la révolution culturelle restera dans les annales chinoises comme l'une des pages les plus tragiquement absurdes.

La fin des Mandchous

Ainsi que l'indique son prénom (ou « nom personnel ») Qingchun, soit « Célébration du Printemps », le jeune fils de la famille Shu est venu au monde sous d'heureux auspices. Il est né, en effet, à Pékin, le 3 février 1899, c'est-à-dire la veille du Nouvel An lunaire, que l'on appelle en Chine fête du printemps. Il appartient aussi, par sa naissance, au peuple des bannières, à la race mandchoue qui, depuis plus de deux siècles, a placé sous son joug l'ensemble de l'Empire.

Mais, en réalité, la situation familiale est fort modeste. La bannière « rouge pleine », dont font partie les Shu, est une des plus basses dans la hiérarchie mandchoue. Illettré comme ses ancêtres, le père du futur écrivain est un simple garde du palais impérial. Lorsque, en août 1900, les troupes alliées viennent délivrer les légations assiégées par les Boxeurs, il est tué en défendant la Cité interdite. Pour entretenir les siens, la veuve est obligée de faire de la couture et des lessives.

De cette double origine, mandchoue mais pauvre, l'écrivain a toujours conservé un souvenir très vif. Il n'y fera que de brèves allusions et n'en parlera pour ainsi dire jamais dans ses différentes œuvres, sauf dans son dernier roman, laissé inachevé et publié seulement à titre posthume. Intitulé Sous la bannière rouge (Zheng hong qi xia), le livre est écrit à la première personne et narre avec force détails les premiers jours de cet enfant du Nouvel An au milieu d'une société en plein déclin, où se côtoyaient le luxe et la misère, la fierté et la honte. Quelques années seulement allaient encore passer, et la fin de l'Empire devait mettre à jamais un terme à l'existence raffinée et si longtemps insouciante des Mandchous de la capitale.

Bien que personnellement très sensible à la disparition du monde de son enfance, le jeune Shu, orphelin à la fois de son père et de son empereur (wu fu wu jun), saura néanmoins échapper à ce passé qui le hante. Le premier de sa lignée, il entreprend des études primaires. Il se lie alors d'amitié avec un autre Mandchou, Luo Changpei. Mais tandis que ce dernier pourra poursuivre jusqu'à l'université et deviendra un grand spécialiste de linguistique, son ami, faute de ressources suffisantes, est contraint d'interrompre ses études secondaires ; heureusement, il est admis à l'école normale de Pékin, où l'enseignement est gratuit.

Au bout de six ans, non seulement il en sort diplômé, mais plusieurs de ses professeurs ont déjà remarqué ses qualités littéraires. Il est alors nommé à différents postes de directeur d'école, puis d'inspecteur, qui l'empêchent de participer notamment au mouvement étudiant qui déferle en mai 1919 sur la capitale. En fait, ces tâches administratives lui pèsent tellement qu'il ne tarde pas à démissionner. Pour vivre, il donne à la place des cours dans diverses écoles de Tianjin et de Pékin. Apprenant l'anglais le soir à l'université Yenching (Yanjing), il entre en contact avec des pasteurs de la London Missionary Society. Sur leur recommandation, il obtient ainsi de partir pour Londres, où il est recruté comme assistant à l'École des langues orientales.

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Écrit par

  • : professeur de littérature chinoise à l'université de Paris-VII

Classification

Autres références

  • CHINOISE (CIVILISATION) - La littérature

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    • 47 508 mots
    • 3 médias
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