LASERS
Inventé en 1958 par les Américains Arthur L. Schawlow et Charles H. Townes et le Russe Nikolaï G. Bassov, le laser est un dispositif qui engendre des rayonnements particuliers grâce à une technique spéciale d'émission dite « stimulée », par opposition à celle des sources usuelles de lumière qui est « spontanée ». Ce terme est formé des initiales des mots anglais light amplification by stimulated emission of radiation, qui signifie amplification de lumière par émission stimulée de rayonnement.
Rappelons que la lumière est un champ électrique alternatif oscillant, qui s'inverse un grand nombre de fois par seconde. Ce champ, associé à un champ magnétique (l'ensemble constituant un champ électromagnétique), se propage dans une direction qui lui est perpendiculaire. Il est de même nature que celui des ondes radio, télévision, radar, mais il vibre à une fréquence des millions de fois plus élevée, tellement élevée que seuls des atomes (ou des molécules) convenablement excités (usuellement par réaction chimique ou collision) peuvent l'engendrer. L'émission de chacun de ces atomes n'a qu'une durée infime (inférieure à 10—14 s), mais leur multitude donne à la lumière naturelle son aspect continu. De la fréquence d'oscillation du champ dépend la couleur de la lumière, et de sa valeur dépend l'intensité lumineuse.
L'éclairement créé par les sources usuelles résulte donc de la superposition de la multitude des champs lumineux créés par chacun des points rayonnants (atomes, molécules) de la source (soleil, lampes, néons...), qui s'additionnent dans le désordre (on pourrait dire que ces points s'ignorent mutuellement). En revanche, dans les lasers, le processus d'« émission stimulée », combiné aux propriétés des résonateurs, synchronise les champs lumineux émis par toutes les zones émettrices du laser, champs qui en chaque point se retrouvent dans le même sens et s'additionnent donc en ordre (« en phase ») : on dit que cette lumière est « cohérente ». L'intensité lumineuse correspondante va donc être immensément supérieure à celle d'une source conventionnelle de même puissance. De ces spécificités, résultent les propriétés de la lumière des lasers. En particulier, l'onde « cohérente » émise par un laser peut être « manipulée » comme on ne savait le faire auparavant que pour les ondes hertziennes :
– On peut la focaliser sur un très petit volume et y créer ainsi des concentrations d'énergie supérieures à ce que l'on sait obtenir par tout autre moyen.
– On peut aussi la former en un faisceau presque parfaitement parallèle, capable de transporter la lumière à grande distance. C'est ainsi que de tels faisceaux peuvent pointer des cibles lointaines pour guider bombes ou missiles, mais aussi, bien plus loin, pour éclairer (voire aveugler, et rendre inopérant) des satellites militaires d'observation. Enfin, concentrés par de grands télescopes, ces faisceaux ont pu atteindre la Lune puis en être renvoyés vers la Terre : les astronomes mesurent ainsi, avec une précision de quelques centimètres, la distance Terre-Lune. Plus modestement, les faisceaux de petits lasers servent à matérialiser les niveaux sur les chantiers de construction, ou guident les machines de percement des tunnels.
De plus, dans la plupart des lasers, le résonateur non seulement maintient en phase, à chaque instant, les points émissifs, mais encore conserve leur synchronisme pendant une période relativement longue. De ce fait, l'onde émise à chaque instant conserve une relation de phase avec celles émises précédemment. On peut donc les superposer pour obtenir des « interférences » conduisant à des mesures de dimensions, de positions ou de vitesses d'une extrême précision. Le laser a ainsi permis des applications spectaculaires, comme[...]
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Écrit par
- Yves LECARPENTIER : professeur à la faculté de médecine, université de Paris-XI, service d'explorations fonctionnelles cardio-vasculaires et respiratoires, hôpital de Bicêtre
- Alain ORSZAG : ingénieur, École polytechnique, docteur ès sciences
Classification
Médias
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