LE BEL ÉTÉ, Cesare Pavese Fiche de lecture
En 1949, Cesare Pavese (1908-1950) publie le volume Le Bel Été, qui réunit, selon ses propres termes, « trois romans urbains, trois romans de découverte de la ville et de la société, trois romans d'enthousiasme juvénile et de passion déçue ». Le Diable sur les collines et Entre femmes seules, rédigés respectivement en 1948 et 1949, suivent le récit éponyme, qui date de 1940. Un même « climat moral » et des thématiques communes associent ces narrations autonomes, sans en faire une véritable trilogie. L'année suivant sa parution, Le Bel Été remporte en Italie le prix Strega.
Une thématique de la corruption
Histoire « d'une virginité qui se défend », dit Pavese, Le Bel Été scrute l'existence de l'insouciante Ginia : sans dormir, car c'est « voler [du] temps à l'allégresse », cette modiste de seize ans ne vit que pour les fêtes. Avec Amelia, son aînée, qui fume et a fait l'expérience du sexe, elle rencontre l'univers de l'art en posant pour des peintres. Après s'être livrée à Guido derrière « la tenture » – le premier titre donné à ce récit – Ginia semble plongée dans un autre été, consumé dans la culpabilité du plaisir charnel et la souffrance d'être ignorée de son cynique amant, qui ne songe qu'à son projet de peindre une colline, « comme une femme étendue ». Huit ans plus tard, Le Diable sur les collines réinterprète ce symbole de la colline, cher à l'auteur, et lié une seconde fois à l'été : « Il n'y a rien qui sente plus la mort que le soleil d'été, que la grande lumière, que la nature exubérante. On respire l'air, on sent l'odeur d'un bois, et l'on s'aperçoit que les plantes et les bêtes se fichent bien de vous. Tout vit et se consume en soi. La nature est la mort... » Luttant contre l'ennui par d'étourdissantes sorties nocturnes qui les conduisent entre ville et campagne, trois jeunes Turinois se retirent dans une ferme paisible, avant d'affronter l'atmosphère contrastée du Greppo. Là, ils seront fascinés par la corruption infernale de Poli, un riche morphinomane, débauché mystique qui vise à sublimer sa déchéance par l'excès de son abandon. Le même mythe moral, ouvert dès le premier roman et déployé dans l'ensemble du volume, semble se clore avec Entre femmes seules, qui a donné lieu à une magnifique adaptation de Michelangelo Antonioni (Le Amiche, 1955). Clelia, la narratrice, y figure une Ginia qui, après avoir connu le succès de l'ascension sociale, serait de retour à Turin en pleine période de carnaval. Elle empêche le suicide de son amie Rosetta – le temps d'un sursis qui durera de l'hiver au printemps – et se remémore les bonheurs de son enfance jusqu'à ce que survienne le décès de son père, un jeudi gras.
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Écrit par
- Carina MEYER-BOSCHI : DEA de littérature italienne contemporaine à l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle
Classification
Média