CAIRE LE
La cité des sultans mamlouks et des Ottomans
Constructions des mamlouks
Le dénombrement des édifices religieux construits sous les sultans mamlouks (1250-1517) ne manque pas d'éloquence : plus de cent cinquante monuments, qui soulèvent encore l'admiration (mosquées, collèges, couvents, mausolées, fontaines).
On imagine l'étonnement des voyageurs européens qui se hissaient au sommet du Moqattam. On avait de là une des plus belles vues du monde, un panorama magnifique, rehaussé d'innombrables coupoles et minarets qui rompaient agréablement la monotonie d'une ville dont les toits étaient en terrasse ; une colossale métropole s'étendait en demi-lune depuis le mausolée de l'imam Shafi‘i, au sud, jusqu'aux tombeaux des califes, à l'autre bout de l'horizon. L'ensemble formait quatre principaux centres urbains très différenciés : Le Caire, cité fatimide proprement dite, ceinte en partie de murailles plus ou moins masquées par des constructions parasites ; Le Vieux-Caire, sur le site de l'ancien Fostat ; Bulaq, autrefois une île, reliée depuis peu au Caire et qui constituait le port commercial sur le Nil ; les cimetières enfin, au nord et au sud de la Citadelle. Certains faubourgs, ceux de Bab al-Luq, de la mosquée d'Ibn Tulun, de Zuwaila, n'offraient plus guère de solution de continuité avec Le Caire.
En Égypte, et principalement au Caire, le commerce a joué de tout temps un rôle primordial. Une bourgeoisie de négociants s'était créée, avide d'un certain confort. Aussi les Cairotes voient-ils s'améliorer leur niveau de vie ; leurs établissements commerciaux prennent une dimension internationale, et ce trafic mondial influe sur la croissance de la ville.
Le xve siècle fut attristé cependant par des démêlés violents qui mettaient aux prises, à intervalles de plus en plus rapprochés, les factions diverses des mamlouks qui, non contents de s'exterminer, dévalisaient les marchés. Pour la paisible population du Caire, ces désordres étaient un véritable cauchemar, l'autorité opprimait plus qu'elle ne garantissait. Les artisans et les boutiquiers n'ont jamais songé à se grouper pour s'affranchir de cette tutelle accablante ; ils se bornaient, en cas de péril, à mettre en lieu sûr les marchandises de prix.
Le grand boulevard
En franchissant la porte septentrionale Bab al-Futuh, on accède à une rue qui est restée intacte : c'était l'avenue la plus large du Caire. Elle s'étend, du nord au sud, sur près de quatre kilomètres et demi.
Cette artère maîtresse, épine dorsale du Caire médiéval, faisait l'unité de la cité. Bien que généralement rectiligne, elle est plutôt un chemin qui serpente ; en fait l'horizon est presque toujours bouché.
Tout au long de l'avenue, les mosquées se succèdent, groupées par trois ou quatre et s'appuyant les unes aux autres. Leurs minarets s'élancent vers le ciel, brodés d'arabesques, ciselés, compliqués avec la plus changeante fantaisie ; ces tours ont plusieurs formes : carrée, rectangulaire ou ronde. La circulation sur ce grand boulevard était difficile : une foule d'hommes s'y pressait, y disputant le passage au cheval du mamlouk, à la mule de l'homme de loi, aux nombreux chameaux qui assuraient les transports, ainsi qu'aux ânes, monture la plus ordinaire. L'on y cheminait donc péniblement, sans cesse bousculé, et cette ruée des piétons et des cavaliers donnait une impression de surpeuplement. Malgré la guerre que leur faisaient les agents de police, des revendeurs étaient assis derrière des piles de pains et autres comestibles. La circulation était encore gênée par les marchands ambulants qui signalaient leur présence par des cris pittoresques et n'avaient pas à pénétrer dans les intérieurs, car les volets s'entrouvraient et, au moyen d'une corde, un couffin hissait du haut d'une fenêtre les victuailles achetées.[...]
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Écrit par
- Éric DENIS : chargé de recherche au C.N.R.S.
- Gaston WIET : membre de l'Institut, professeur honoraire au Collège de France
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Médias
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