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CHARIVARI LE (1832-1937)

L'existence du Charivari, quotidien de caractère polémique, ne peut être dissociée de celle d'un autre journal, La Caricature, dont la durée fut éphémère mais qui joua un rôle déterminant dans la naissance de la grande caricature française. Ce fut, en effet, dans La Caricature que fut publié le fameux portrait de Louis-Philippe en forme de poire. L'auteur de cette œuvre n'était autre que Philipon, le directeur du journal, qui, très entreprenant, devait lancer également Le Charivari. La Caricature ne tarda pas à succomber sous les coups d'une censure que le gouvernement, issu de la révolution de 1830, avait promis de supprimer définitivement.

La Caricature disparue, Philipon concentre tout son esprit critique dans Le Charivari. La feuille, à sa naissance, se compose de quatre pages dont une seule comporte une estampe qui n'est pas toujours, tant s'en faut, une caricature. Philipon a l'intelligence de comprendre l'importance, pour la presse, de l'invention de l'Allemand Senefelder : la lithographie. Cette technique, surtout utilisée pour la reproduction des œuvres d'art, concurrence l'emploi de la gravure sur bois. Cette dernière est cependant plus économique dans la mesure où elle peut être tirée en même temps que les caractères typographiques, alors que la lithographie exige un tirage séparé. Mais dès le numéro 232 (21 août 1834), Philipon annonce que désormais même les caricatures feront l'objet d'un « tirage soigné » et, dès le lendemain, Traviès donne un dessin qui, par son ampleur, la richesse de sa matière, rompt avec tout ce qui avait été publié jusqu'alors. Cette utilisation de la lithographie a une influence décisive sur l'évolution de Daumier qui tirera le meilleur parti de la nouvelle technique.

Bien que Le Charivari ait laissé le souvenir d'un journal ayant « lancé » Daumier, Gavarni, Traviès, Henri Monnier, sa prose n'est pas négligeable. L'équipe rédactionnelle lance de vigoureuses attaques contre le régime et, en particulier, à propos de la censure. Le ministère de l'Intérieur est tenu par Thiers qui, déjà, mène une bataille acharnée contre la presse et les auteurs dramatiques. À partir de 1834, le titre du journal est précédé d'un bandeau orné du mot « Liberté » dont les lettres, montées sur des jambes, s'enfuient devant une charge de fantassins et de cavaliers représentant la saisie. La poire qui avait fait les beaux et les mauvais jours de La Caricature réapparaît. Au cours d'une même année on la voit avec des abeilles à la place des yeux et de la bouche, accompagnée de cette légende : « La poire commence à mûrir » ; un peu plus tard elle surmonte la « machine législatifère de la monarchie représentative » ; quelques semaines après, elle figure dans un rébus ; enfin, on la voit portée sur un plateau par un garçon de café. Ces provocations amènent la censure à s'interroger sur l'utilisation des formes en apparence les plus anodines, ce qui conduit la rédaction à écrire : « Aujourd'hui, nous voulions publier une suite de petits sujets étrangers à la politique, mais dans le nombre des dessins s'est trouvé un jeune homme devant une table sur laquelle est posée une énorme brioche, et la censure a mis son veto. Comme on le voit, le cercle des formes permises se rétrécit tous les jours davantage ; il en est de même de l'intelligence des censeurs. »

Sous le second Empire, les attaques du Charivari contre le pouvoir se font moins violentes, dans la mesure où la direction du journal, libérale, ne voit pas d'un œil favorable se développer l'activité de Blanqui et des républicains de tendance socialiste. Cham prend alors une importance grandissante au sein de l'équipe des dessinateurs. Philipon, qui a cédé la direction du journal à[...]

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