LE CUIRASSÉ "POTEMKINE", film de Serge Mikhailovitch Eisenstein
Conscients de la force du cinéma comme instrument de propagande, les premiers dirigeants soviétiques avaient favorisé l'accès à la réalisation de jeunes réalisateurs acquis à la révolution, et formellement innovants. C'est en mars 1925 que la firme d'État Goskino lança la production d'une série de films pour célébrer l'anniversaire de la révolution de 1905, et la confia au réalisateur d'un film controversé mais remarqué, La Grève (Statchka, 1924). Le premier film de la série, Le Cuirassé « Potemkine » (Bronenosets Potyomkin), fut terminé juste à temps pour l'avant-première, au théâtre Bolchoï, le 24 décembre 1925. Il fut bien accueilli à Moscou, où il apparut comme exemplaire de la vitalité du cinéma soviétique, et de ce qu'on appelait déjà un peu partout « le montage à la russe ». Mais c'est le véritable triomphe obtenu à Berlin qui, d'un jeune cinéaste prometteur, fit de Serge Mikhailovitch Eisenstein (1898-1948) une vedette internationale, que Hollywood, quelques années plus tard, devait en vain tenter d'acclimater, et qui demeura, jusqu'à la fin de sa vie, en 1948, aux yeux de tous, le réalisateur du « Potemkine ».
Un drame en cinq actes : victoire de l'insurrection
Eisenstein était fier de sa construction en cinq parties, qu'il comparait à celle de la tragédie classique. 1. En rade d'Odessa, à bord du cuirassé, où règne la discipline la plus rigide, trente matelots refusent de manger une viande avariée servie au repas. 2. Ils sont condamnés à être fusillés. Mais l'un d'eux, Vakoulintchouk, exhorte les soldats qui doivent les exécuter, et renverse finalement la situation. Les marins jettent les officiers par-dessus bord et s'emparent du navire. 3. Le corps de Vakoulintchouk, tué durant l'émeute, est exposé sur le port d'Odessa, où les habitants viennent manifester leur sympathie aux insurgés. 4. Un détachement d'infanterie repousse les manifestants, et les massacre alors qu'ils tentent de se sauver dans les escaliers. 5. Le cuirassé répond en bombardant le Quartier général. L'escadre amirale arrive ; après un moment de suspense, elle laisse passer le « Potemkine », qui file vers la haute mer.
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Écrit par
- Jacques AUMONT : professeur à l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle, directeur d'études, École des hautes études en sciences sociales
Classification
Média
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