LE DÉCLIN DE L'OCCIDENT, Oswald Spengler Fiche de lecture
Une politique opportuniste de la décadence
Souvent critiqué pour ses approximations, ses informations parcellaires et des comparaisons fragilisées par le recours systématique et contestable à la méthode analogique, Le Déclin reste une synthèse impressionnante qui étonne autant par la force de son argument déterministe, administré au moyen d'une référence biologique constante, que par la pertinence, saluée par Adorno, de ses analyses critiques de la civilisation et la dimension tragiquement prophétique de ses conclusions. Partagée par Mosca, Weber, Pareto et Michels, l'analyse spenglérienne des effets de la montée du rationalisme contient des éléments originaux qui la distinguent des auteurs des « idées de 1914 » (T. Mann, M. Scheler, W. Sombart), opposant la culture allemande à la dépravation des autres civilisations européennes. En effet, l'option nationaliste adoptée ici consiste non pas à croire en une résurgence possible des valeurs anciennes, mais à transcender l'opposition classique des deux concepts en incitant le peuple à s'approprier le rationalisme pervers de la modernité et à l'instrumentaliser froidement pour servir la volonté de puissance et les fins de l'imperium germanicum. L'optimisme final qu'autorise, selon l'auteur, cette promesse d'hégémonie, également défendue dans un article intitulé Pessimisme ? (1921), s'appuie néanmoins sur un « conservatisme révolutionnaire » qui, fondé sur le culte d'un « César flamboyant », la haine du capitalisme, l'éloge de la force et du conflit, l'impératif autarcique voire l'encouragement au racisme culturel, a inscrit ce promoteur d'un régime autoritaire sinon totalitaire au rang des penseurs antihumanistes et antidémocratiques.
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Écrit par
- Éric LETONTURIER : docteur en sociologie, D.E.A. de philosophie, maître de conférences à l'université de Paris V-Sorbonne
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