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LE DÉCOR IMPRESSIONNISTE. AUX SOURCES DES NYMPHÉAS (exposition)

Vers les Nymphéas

La section suivante, « Sens et fonction de l’objet », était la plus limpide. Guidés par une pensée critique –  Pissarro regrette l’industrialisation galopante quand Renoir dénonce la mécanisation de la production –, les impressionnistes se sont plu à créer des objets décoratifs. Les intentions sont claires : imaginer des assiettes, un cadre, des carreaux de faïence ou des éventails à l’échelle de l’artiste. Toutefois, leurs aspirations restent modestes et les développements limités, en comparaison par exemple des Arts and Crafts en Grande-Bretagne.

La quatrième salle, « Un peu de gaîté sur un mur », soulignait l’influence du xviiie siècle sur Monet, Morisot ou Cézanne pour certains décors conçus dans les années 1880. Renoir dominait cet ensemble avec ses célèbres Baigneuses. Essai de peinture décorative (1884-1887), ouvertement ornementales (monumentalité des corps nus, matité empruntée à la fresque, format horizontal). La salle suivante, « Fleurs et jardins », démontrait avant tout l’appétit remarquable de Caillebotte pour le décor avec le saisissant Parterre de marguerites (vers 1892-1893), traité avant l’heure selon la technique de l'all-over consistant à recouvrir une toile de manière presque uniforme, sans bords ni centre. Les deux dernières sections portaient sur la genèse des Nymphéas de Monet, l’un des cycles décoratifs les plus aboutis de la peinture des xixe et xxe siècles. Cette histoire, connue et documentée, s’achevait avec La Barque (1887), flottant sur une eau pareille à un océan de peinture pure.

À l’origine, l’exposition aurait dû être accueillie au musée d’Orsay, puis à la National Gallery de Londres, avant que des problèmes budgétaires contraignent les organisateurs à s’en tenir à un parcours abrégé au musée de l’Orangerie. Si la proximité avec les Nymphéas de Monet au rez-de-chaussée de l’institution était heureuse, elle ne suffisait pas à dissiper un sentiment de confusion, notamment à cause de l’absence d’une analyse effective de l’approche hésitante de la question décorative par les impressionnistes. En effet, dès la première salle étaient placées sur le même plan la question du décor (la conception d’un ensemble d’ornements employés pour parer une pièce, un bâtiment ou un objet) et celle du décoratif (la production d’un effet aimable dans une peinture). Enfin, on peut regretter que le contexte historique – celui de la fin du second Empire et de la IIIe République – et les sources esthétiques et politiques, nécessaires à la compréhension de l'ambivalence des impressionnistes, aient été relégués aux seules pages du catalogue.

— Camille VIÉVILLE

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Écrit par

  • : docteure en histoire de l'art contemporain, historienne de l'art, auteure

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Média

<em>Périssoires</em>, G. Caillebotte - crédits : Leemage/ Corbis/ Getty Images

Périssoires, G. Caillebotte