LE GUÉPARD, film de Luchino Visconti
Après le superbe mélodrame social Rocco et ses frères (Rocco i sui fratelli, 1960), et presque dix ans après Senso (1954), qui se déroule dans la Venise de 1866 en guerre avec l'Autriche, Luchino Visconti (1906-1976) renoue avec l'histoire en adaptant l'unique roman, publié en 1958, de l'aristocrate sicilien Giuseppe Tomasi di Lampedusa (1896-1957). Mais au lieu de raconter une tragédie amoureuse, il décrit avec distance le destin de la Sicile à travers la figure d'un prince vieillissant. Le Guépard (Il Gattopardo) est un des rares grands films à costume et à grand spectacle où la passion amoureuse contrariée ne joue presque aucun rôle. Pour les Italiens, le film se relie à une période capitale, celle de l'unification du pays, dont les figures, Garibaldi et Cavour, ont donné leur nom aux grandes artères de presque toutes les villes de la péninsule. L'œuvre obtint un grand succès, mais son caractère politique ne fut pas toujours perçu.
Le crépuscule de l'aristocratie sicilienne
En 1860, les troupes de Garibaldi envahissent la Sicile, et le prince Don Fabrizio Salina, noble désargenté de très vieille naissance, sentant venir la fin de la grande aristocratie, arrange le mariage de son neveu Tancredi Falconeri avec la belle Angelica Sedara, la fille – peu raffinée, mais saine et généreuse – de Don Calogero Sedara, riche bourgeois, maire d'une petite ville où le prince possède un palais de villégiature. D'abord révolutionnaire et garibaldien, le bouillant Tancredi a tôt fait de se rallier au nouveau pouvoir et de se désintéresser de ses idéaux, de même qu'il a vite oublié sa cousine Concetta dont il semblait épris. La Sicile est annexée à l'Italie. Le prince Salina décline la fonction de sénateur qui lui est proposée, acceptant de passer le flambeau à la jeunesse. Au cours d'un grand bal qui voit l'entrée d'Angelica dans l'aristocratie de Palerme, nous le voyons danser une dernière fois, avant de se retirer. Dans la ville, on fusille des révolutionnaires sans que personne ne s'en soucie.
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Écrit par
- Michel CHION : écrivain, compositeur, réalisateur, maître de conférences émérite à l'université de Paris-III
Classification
Médias