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LE MANUEL DES INQUISITEURS, António Lobo Antunes Fiche de lecture

António Lobo Antunes - crédits : Eric Robert/ Sygma/ Getty Images

António Lobo Antunes

Le Manuel des inquisiteurs, paru en 1996, est le onzième roman de l'écrivain portugais António Lobo Antunes (né en 1942). Le titre de ce roman, qui semble avoir une résonance ibérique, est emprunté à un ouvrage français du xive siècle. Lobo Antunes s'est expliqué sur cet emprunt dans le Jornal de letras de Lisbonne : qu'importait le contenu de cet ouvrage ancien, c'est le titre qui l'a retenu ; il semblait fait pour son livre. Le Manuel des inquisiteurs est un épais roman de plus de cinq cents pages. Il constitue une somme qui englobe cinquante ans de la vie du Portugal, avant, pendant et après la révolution du 25 avril 1974, cette révolution dite « des œillets » qui a mis fin à quarante années de dictature. Cette longue et dure période de l'histoire du Portugal est représentée par l'histoire d'une famille dont la puissance s'effondre et qui se souvient de son passé fastueux : « Le domaine et la maison du temps de mon père, avec son escalier flanqué d'angles de granit et de jacinthes qui poussaient le long des murs, avec son affairement de servantes dans les couloirs semblable à celui des personnes qui s'agitaient dans l'antichambre du tribunal... » On la voit rongée de l'intérieur par une dégradation morale et sociale qui la ruine.

Pouvoir et histoire

Nous avons ainsi, avec Le Manuel des inquisiteurs, le premier ouvrage d'un cycle romanesque centré sur le pouvoir. Au-delà de la raideur et de la violence du pouvoir politique, il vise également toutes les formes insidieuses du pouvoir, celles qui pourrissent les relations entre les êtres, à la manière d'un fascisme subreptice. Ainsi, le romancier approfondit et systématise une interrogation de la réalité portugaise, avec une obstination et une véhémence familières au lecteur depuis ses premiers livres, Mémoire d'éléphant et Le Cul de Judas, tous deux parus au Portugal en 1979.

Ces ouvrages, d'inspiration ouvertement autobiographique, mettent en scène et condamnent l'horreur de la guerre coloniale. Comme tant de Portugais de sa génération, l'auteur-narrateur, un jeune médecin, a, durant vingt-huit mois, fait la guerre en Angola, aux confins du monde. On remarquera la dédicace du Manuel des inquisiteurs : « À Ernesto Melo Antunes, mon capitaine depuis vingt-cinq ans, dont le courage et l'honnêteté m'ont toujours servi d'exemple. » Elle dit assez la prégnance de cette expérience. Dès cette date, António Lobo Antunes a défini son projet littéraire, qui est aussi un projet existentiel : « ...la recherche d'un espace blanc où m'ancrer. »

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Écrit par

  • : Grand prix national des Lettres (traduction) 1990, responsable littéraire du secteur de langue portugaise aux éditions Gallimard

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António Lobo Antunes - crédits : Eric Robert/ Sygma/ Getty Images

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