LE MÉPRIS, film de Jean-Luc Godard
Adapté du roman d'Alberto Moravia (Il Disprezzo, 1954), qui décrit la préparation du tournage de L'Odyssée d'Homère par un producteur italien et un réalisateur autrichien, le sixième long-métrage de Jean-Luc Godard – et son film le plus « classique » – ouvre sur une analyse personnelle de la situation du cinéma en 1963, à l'heure des superproductions internationales. Godard utilise le mythe de Brigitte Bardot, alors au faîte de sa gloire, qui interprète Camille, la femme du scénariste joué par Michel Piccoli, lequel accède à cette occasion au vedettariat. Il confie le rôle du réalisateur à Fritz Lang, alors que, dans le roman initial, Moravia avait pensé à G. W. Pabst pressenti par la société italienne Lux Films pour réaliser L'Odyssée avec Kirk Douglas dans le rôle d'Ulysse. Godard, que l'on retrouve sous les traits de l'assistant-réalisateur du maître, est l'un des cinéastes de la Nouvelle Vague les plus cinéphiles. Le roman de Moravia lui offre l'occasion de réaliser un film sur le cinéma, ou plus exactement sur les conditions de tournage d'un film, comme Vincente Minnelli avait pu le faire dans Les Ensorcelés (The Bad and the Beautiful, 1952) ou Quinze Jours ailleurs (Two Weeks in Another Town, 1962).
Une tragédie moderne
Paul Javal, jeune auteur dramatique, est marié à une très belle femme, Camille, une ancienne dactylo. Ils viennent d'acheter un appartement à Rome, ce qui crée des soucis d'argent à Paul. Un producteur américain, Jeremy Prokosch, lui demande d'intervenir sur le scénario d'une adaptation de L'Odyssée que tourne le réalisateur Fritz Lang en Italie. Paul visionne les rushes de scènes déjà tournées et accepte la proposition du producteur, ainsi qu'une invitation à venir boire un verre dans la villa romaine de ce dernier, en compagnie de son épouse. Camille croit alors que son mari la pousse dans les bras du producteur et, soudain, se met à le mépriser. De retour dans leur appartement, Paul tente de comprendre le brutal changement d'attitude de sa femme. Mais plus il l'assaille de questions, plus elle s'enferme dans son mutisme et dans son mépris. Le couple se rend ensuite avec Prokosch, Lang et l'interprète Francesca dans une très belle villa de Capri, au bord d'une falaise qui surplombe la mer où l'on situe les sirènes de L'Odyssée. Lang et Paul s'affrontent sur l'interprétation des motivations du retour d'Ulysse, Paul soutenant que si Ulysse tarde à revenir à Ithaque, c'est par crainte de revoir Pénélope, sachant qu'il doit la reconquérir. Paul pousse à nouveau Camille à rentrer avec Prokosch pendant qu'il discute avec Fritz Lang. De retour dans la villa, Paul surprend un baiser que donne ostensiblement Camille au producteur. Il décide alors brutalement de renoncer au travail sur le scénario. Mais Camille quitte la villa avec le producteur qui repart pour Rome. Sur la route, l'Alfa Romeo rouge de Prokosch percute un camion-citerne et les deux passagers sont tués.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Michel MARIE : professeur à l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle
Classification
Autres références
-
LE MÉPRIS (J.-L. Godard), en bref
- Écrit par Joël MAGNY
- 226 mots
Jean-Luc Godard adapte un roman psychologique d'Alberto Moravia, Le Mépris (1954). La presse s'empare de l'événement. Non pas à cause de Moravia, mais parce que « l'enfant terrible de la Nouvelle Vague » tourne avec Brigitte Bardot, star devenue « mythe », à qui ...
-
PARLANT (CINÉMA) - (repères chronologiques)
- Écrit par Michel CHION
- 3 201 mots
1899 États-Unis. The Astor Tramp, « picture song » de Thomas Edison. Bande filmée destinée à être accompagnée d'une chanson chantée en salle (derrière l'écran) par des artistes invités.
1900 France. Présentation par Clément Maurice du Phono-Cinéma-Théâtre à l’'Exposition universelle....