LE MONDE SELON TOPOR (exposition)
L’image dans tous ses états
Les affiches constituent une partie des productions consacrées aux spectacles. Parmi elles, LeTambour pour le film de Volker Schlöndorff (1979) adapté du roman éponyme de Günter Grass (1959). On y voit Oscar, l’enfant héros du film qui refuse de grandir sous le régime nazi, confondu graphiquement avec son tambour. Il bat la mesure d’un temps inacceptable, comme le fit sans doute Topor avec ses dessins. Un espace central, cœur de ce trajet labyrinthique, est consacré à la projection de séquences de films dont LaPlanète sauvage (1973), prix spécial du jury au festival de Cannes, un film d’animation réalisé avec René Laloux. L’exposition présente également les marionnettes d’origine de la série Téléchat, diffusée à la télévision en France et en Belgique à partir de 1983, et rappelle le long travail d’élaboration avec le réalisateur belge Henri Xhonneux. Sont également évoquées les productions télévisuelles Merci Bernard, de 1982 à 1984 sur la chaîne de télévision FR3, puis Palace à la fin des années 1980 sur Canal Plus et Antenne 2, pour lesquelles Topor écrivit des sketches où l’on retrouve l’esprit d’Hara-Kiri. Avec L’Hiver sous la table (1994) apparaît un autre registre dans lequel les souffrances de l’exil confinent à l’absurdité. Les décors de théâtre d’Ubu roi, l’affiche de L’Empire de la passion pour le film de Nagisa Oshima (1978) et d’autres motifs encore affirment la polyvalence d’un pouvoir créateur qui n’en finit pas d’étonner.
La dernière partie de l’exposition, consacrée à Topor artiste et écrivain, rassemble nombre de créations de tout style et célèbre son « ivresse du livre ». Le livre-gag, comme Le Tachier de l’amateur (2003), trouve une résonance savoureuse d’être mis très concrètement en œuvre par l’auteur grâce à un enregistrement filmique. Citons également le Topsychopor, un jeu en forme de test ; Jeux de table, ensemble de six lithographies ; Les Passions moyennes parmi lesquelles celle, ébouriffante, d’une femme qui en brossant le dos d’un homme en manteau le réduit en poussière. Enfin, ce Voyageur immobile, image du migrant jamais arrivé, qui évoque le motif gravé sur la tombe de Topor au cimetière du Montparnasse, dernier lieu d’un ultime voyage aux pays des hommes.
Le parcoursse termine avec Courts termes. Cet entretien filmé avec Eddy Devolder dévoile l’extrême subtilité de l’homme et de l’œuvre, de celui qui a choisi de cultiver l’ambiguïté, d’échapper aux pièges des entretiens par le rire, un rire fait d’allergie au tragique. Toujours, Topor refusa d’être cantonné au rôle d’humoriste, et cette exposition permet de comprendre quels enjeux accompagnent sa trajectoire. Ainsi, en 1962, la création du groupe Panique avec Topor, Arrabal et Jodorowsky a affirmé leur commune volonté de distanciation à l’égard du surréalisme comme des tentatives d’enfermement dans des groupes d’activistes normalisés.
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Écrit par
- Nelly FEUERHAHN : chercheuse honoraire au CNRS
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