LE MYSTÈRE CORIOLIS (A. Moatti)
Des « forces » déviantes
Lorsque, en 1829, l’École centrale des arts et manufactures est née d’une initiative privée, elle se présente comme une « École polytechnique civile » ou une « Sorbonne industrielle ». Nommé professeur de mécanique appliquée et rationnelle en 1831, Coriolis y développe un enseignement original mêlant le calcul différentiel et un exposé de mécanique allant jusqu’aux applications industrielles des roues hydrauliques et des machines à vapeur. C’est à cette époque qu’il développe l’étude du mouvement relatif des systèmes de corps et introduit les « forces centrifuges composées » connues maintenant comme les « forces de Coriolis ». L’article paraît en 1835 dans le Journal de l’École polytechnique. La même année, il publie sa Théorie mathématique des effets du jeu de billard, alliant la précision scientifique à son goût pour ce divertissement auquel il consacre une grande partie de son temps libre. Élu à l’Académie des sciences en 1836, nommé directeur des études à l’École polytechnique à partir de 1838, Coriolis sera de plus en plus absorbé par des tâches administratives. Solitaire, profondément attaché à la religion catholique, il meurt de tuberculose à l’âge de cinquante et un ans, laissant le souvenir d’un savant austère et attachant.
Cette biographie richement documentée montre tout l’intérêt pour l’histoire des sciences qu’ont des études centrées sur une personnalité dont l’envergure scientifique, sans être négligeable, n’est pas celle des quelques génies dont chacun reconnaît le rôle essentiel. Elle est aussi l’heureuse occasion de brosser un tableau de l’évolution des écoles d’ingénieurs à une époque où instabilité politique et révolution industrielle bouleversent nombre de traditions.
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Écrit par
- Bernard PIRE : directeur de recherche émérite au CNRS, centre de physique théorique de l'École polytechnique, Palaiseau