LE NÉO-IMPRESSIONNISME (exposition)
Pour la première fois en France, une rétrospective d'ensemble était consacrée, du 14 mars au 10 juillet 2005, par le musée d'Orsay à Paris, au néo-impressionnisme. Son titre, Le néo-impressionnisme : de Seurat à Paul Klee, en soulignait l'ambition. Il ne s'agissait pas simplement de retracer l'histoire d'un mouvement dont les membres, à la suite de Georges Seurat (1859-1891), renouvelèrent et dépassèrent les acquis des impressionnistes, en prenant symboliquement leur relève, notamment par la présentation, lors de la dernière exposition du groupe impressionniste en 1886, d'Un dimanche à La Grande Jatte (1884-1886), tableau-manifeste de Seurat.
Les commissaires de l'exposition, Serge Lemoine et Marina Ferretti Boquillon, par ailleurs directeurs du catalogue (Musée d'Orsay-Réunion des musées nationaux, Paris), ont voulu – ce qui n'avait pas été fait complètement jusque-là – donner au mouvement une dimension européenne. Le néo-impressionnisme, notamment par l'intermédiaire du groupe des XX à Bruxelles, s'est en effet rapidement développé en Belgique, avec Théo van Rysselberghe, Alfred William Finch, Henry van de Velde et Georges Lemmen. Il a essaimé ensuite aux Pays-Bas grâce à Jan Toorop, puis en Suisse, en Allemagne et en Italie.
Les organisateurs de la rétrospective ont également souhaité élargir la perspective en reliant au mouvement les avant-gardes du début du xxe siècle. Paul Klee n'était ainsi que l'un des artistes de cette période s'inscrivant dans la continuité du néo-impressionnisme, qui aboutissait presque naturellement à la peinture moderne. Matisse, Malévitch, Kandinsky, Mondrian, Severini, Picasso étaient aussi présents au terme du parcours. Comme il était également indispensable de donner une vision plus complète du mouvement en France, on pouvait découvrir à Orsay des toiles représentatives de Charles Angrand, Albert Dubois-Pillet ou Léo Gausson, moins attendus que Paul Signac, Henri-Edmond Cross ou Maximilien Luce, illustrés ici par de remarquables ensembles – sans oublier le seul impressionniste qui rallia résolument, pendant un temps, les rangs des « néos » : Camille Pissarro (au côté de son fils Lucien).
Il s'agissait donc d'une exposition majeure, même si certaines œuvres capitales manquaient à l'appel (les grands tableaux de Seurat, tous à l'étranger, ne sont que rarement, ou jamais prêtés), et même si parfois le visiteur était confronté à un certain éparpillement, tel artiste n'étant représenté que par un seul tableau, pas toujours le plus significatif.
Le parcours avait été construit autour des aspects purement formels du néo-impressionnisme. C'était se mettre dans les pas de Seurat, qui avait conçu sa technique de la division des couleurs en lisant différents traités d'optique ou d'esthétique – ceux d'Eugène Chevreul, de Charles Henry ou d'Ogden Rood. Il s'agissait de juxtaposer sur la toile de petites touches de couleur pure, pour que l'œil du spectateur recrée ensuite, placé à la distance convenable, l'impression colorée d'ensemble. On passait ainsi successivement d'une salle dévolue à l'espace plan (où figurait « l'étude complète » pour la première grande toile de Seurat, Une baignade, Asnières, 1884) à une autre consacrée au rythme, où, de même, Un dimanche à La Grande Jatte était évoqué par son « étude d'ensemble ». Étaient ensuite traités la géométrie, l'arabesque, la pose, la dualité intérieur/extérieur, la lumière, les nocturnes, la couleur, puis deux aspects plus thématiques. Celui des « Arcadies », constituant un des points d'ancrage du mouvement – Matisse, avec Luxe, calme et volupté (1904-1905), répondant à L'Air du soir (1893-1894) de Cross –, et celui des symboles.[...]
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Écrit par
- Barthélémy JOBERT : ancien élève de l'École normale supérieure, professeur à l'université de Paris-IV-Sorbonne
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