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LE PAPIER C'EST LA VIE (exposition)

Loin des rituels commémoratifs habituels, l'expositionLe Papier, c'est la vie, présentée au palais de la Découverte du 9 février au 17 octobre 1999, est originale sur bien des plans. Cette pièce maîtresse d'un ensemble de manifestations coordonnées par la Confédération française de l'industrie des papiers, cartons et celluloses (Copacel), à l'occasion du « bicentenaire de l'invention de la machine à papier », est parfois plus proche des installations d'art contemporain que des présentations traditionnelles en la matière. La nature même du papier et du carton, avec lesquels la vue et le toucher entretiennent des rapports particuliers, induit sans doute ces émotions et interrogations esthétiques.

Un grand totem hexagonal accueille le visiteur avec l'histoire du papier. Le 18 janvier 1799, Louis-Nicolas Robert (1761-1828), inspecteur de la papeterie d'Essonnes, dépose le brevet de la machine à papier en continu, capable de produire autant que dix hommes. Aussitôt passée en Angleterre, puis diffusée en Europe et aux États-Unis, celle-ci révolutionne la fabrication, multiplie la production et ouvre la voie au papier industriel contemporain.

Les autres panneaux du totem évoquent les premiers supports du graphisme et de l'écriture (pierre, os, argile, papyrus, parchemin) et la lente route du papier, depuis son invention en Chine (iie s. av. J.-C.) et son expansion dans le monde musulman (viiie-xie s.) jusqu'à sa conquête de l'Europe chrétienne (xiiie-xive s.). Le développement du papier devient alors lié à celui de l'imprimé, puis à l'avènement de la civilisation industrielle et de la grande industrie papetière (1850-1910), jusqu'à la diversification actuelle de ses usages.

La scénographie, qui repose sur le papier lui-même (à la fois objet, décor et support), plonge vite le visiteur dans un univers d'architecture éphémère aux accents surréalistes et d'installations de matières premières : cascade d'éclats de bois figée sur des rames de papier brut, tas de bois semblable à une œuvre de Richard Long, balles de recyclage empilées comme autant d'hommages à César et Arman. Les pas du visiteur sont ensuite guidés entre une réplique de la machine de Robert et une longue photo d'une machine actuelle, d'une part, et de grands clichés au microscope électronique dévoilant la structure fibreuse polymorphe des différents types de papier, d'autre part.

La section « Imagine un monde sans papier » confine au dadaïsme : tablette de chocolat dépouillée de ses peaux colorées et argentées, bouteille de plastique marquée d'un gros point d'interrogation, bonbons multicolores, crayons en attente de s'exprimer… L'ambiance sonore joue alors la candeur enfantine (« Il est où ton crayon et ton papier ? »), l'imaginaire du quotidien (« Police, vos papiers, s'il vous plaît ! ») ou l'actualité brûlante (« Où sont les sans-papiers ? »).

Invitant à l'interactivité, le « Mur à toucher » est formé de vingt papiers de qualités différentes suspendus à des cordes à linge pour présenter le vocabulaire (grain, grammage…). Les claustras voisins évoquent les cloisons de la maison japonaise, lorsqu'ils racontent la quête du blanc parfait, ou l'abstraction géométrique d'un Mondrian, lorsqu'ils forment un monumental catalogue de couleurs vives.

Un grand mur de collages et d'affiches lacérées plonge le spectateur entre les traces nostalgiques de films et de « réclames » des dernières décennies et les arrachés de Jacques Villeglé. En face, les niches d'un mur de carton ondulé proposent des dioramas sur les usages du papier. Puis la belle ordonnance fait place à une forêt de bornes informatives sur la production, la transformation, la distribution et la recherche. Les mots défis[...]

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Écrit par

  • : chercheur honoraire au centre Alexandre Koyré, EHESS-CNRS-MNHN, Paris

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