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LE PROCÈS DES DROITS DE L'HOMME. GÉNÉALOGIE DU SCEPTICISME DÉMOCRATIQUE (J. Lacroix et J.-Y. Planchère)

Droits de l’homme et citoyenneté

La deuxiéme partie de l’ouvrage est consacrée à la généalogie de ces positions. Les auteurs analysent successivement les critiques formulées par Burke au nom de la tradition, par Bentham et Comte au nom de l’utilité sociale, par de Bonald et de Maistre au nom des droits de Dieu, par Marx au nom de l’émancipation humaine, et enfin par Schmitt au nom « d’un concept contre-révolutionnaire du politique qui réinvestit l’idée démocratique ». Ces analyses précises et nuancées visent à dégager les différents motifs des critiques adressées aux droits de l’homme par ces auteurs classiques, à pointer leurs similitudes et leurs différences, et la manière dont, en circulant d’un auteur à un autre, ces arguments ont pu voir leur sens profondément renouvelé. L’enjeu central reste cependant de montrer que les thèses ainsi forgées ont joué un rôle matriciel dans le développement des critiques contemporaines. Cette hypothèse de lecture est sous-tendue par la thèse d’une continuité entre les droits de l’homme originels et les droits humains contemporains que les auteurs défendent dans l’introduction, contre la position discontinuiste de Samuel Moyn.

La dernière partie de l’ouvrage, placée sous le signe de la référence à Arendt, esquisse une conception des droits de l’homme capable de répondre à ces différentes objections. Relisant le célèbre texte « Le déclin des États-nations et la fin des droits de l’homme », les auteurs soutiennent, dans le sillage de Miguel Abensour, Étienne Balibar et Étienne Tassin, qu’il ne se contente pas de mettre en évidence les limites des droits de l’homme en prenant appui sur la situation des apatrides dans l’entre-deux-guerres, sans droits du fait d’être privés de nationalité. Il ouvre bien plutôt à une conception politique des droits de l’homme, qui se distingue « d’une conception “philosophique” en ce sens que le souci est moins de déterminer les fondations des droits de l’homme que de s’interroger sur leur réalisation pratique », susceptible de conduire à un « droit à l’inclusion politique ». Dans cette perspective, les droits de l’homme deviennent indissociables d’une citoyenneté pensée comme pratique de la liberté en commun et doivent être appréhendés comme l’un des supports de l’autonomie et de l’égalité des citoyens.

— Marie GARRAU

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Écrit par

  • : docteure en philosophie, chercheuse rattachée au laboratoire SOPHIAPOL, université Paris-Ouest-Nanterre-La Défense

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