LE PUY-EN-VELAY
Le Puy, préfecture de la Haute-Loire, s'épanouit au cœur d'un ample bassin tertiaire, perché à 630 mètres d'altitude, encadré de lourds sommets, et isolé par des cols à plus de 1 000 mètres. Pourtant, ce n'est pas cette situation, partagée avec d'autres lieux proches, qui a fait sa fortune. C'est son site exceptionnel, constitué de pointements volcaniques acérés, jaillis au cœur même du bassin (rocher de l'Aiguilhe, rocher Corneille, mont Anis), qui lui a valu l'intérêt du surnaturel : sanctuaire gallo-romain, puis apparition de la Vierge, construction d'une basilique mariale (Notre-Dame du Puy) et point de départ d'un des chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle (via Conques et Moissac).
La ville de l'évêque-comte (depuis le xiie siècle, les évêques du Puy sont comtes du Velay), rempart de la résistance catholique aux « hérésies » languedociennes, attire les clercs et les marchands. Elle s'érige jusqu'à la Révolution en un bastion dévot et conservateur. Mais ce petit monde cultivé suscite la création d'activités artisanales préindustrielles nécessaires à une société policée et très au fait des choses de la cour : préparation des peaux, travail des cuirs, papeterie et, bien sûr, la dentelle, mobilisant toutes les paysannes des environs, dans un système de « fabrique » à la lyonnaise et dont l'origine doit beaucoup aux habits sacerdotaux.
Sous la Révolution, Le Puy devient préfecture « par défaut », en l'absence de concurrence sur le Velay, lequel ne savait d'ailleurs à qui se rattacher. Pour que le département atteigne un seuil critique de viabilité, on adjoint à la Haute-Loire ponote (le bassin du Puy) la plaine de Brioude (le Brivadois), située au nord-ouest, manifestement auvergnate et qui ne le demandait pas.
Depuis lors, la fonction préfectorale a éclipsé la fonction religieuse et Le Puy (19 734 habitants dans la commune et environ 74 519 dans l'aire urbaine en 2012) est devenu le prototype parfait de la ville vivant de son rôle administratif (préfecture et ses services, conseil général, lycées et collèges, centre hospitalier...). Le maintien de l'activité commerciale et des services privés en est également tributaire, grâce au volant des salaires de la fonction publique ; car, si ces activités se sont, depuis la Seconde Guerre mondiale, mises au service de la population du bassin, l'aire d'influence est peu peuplée et peu riche. De plus, le Brivadois est exclu de cette zone (il s'adresse directement à Clermont), de même que le Sigolénois et le bassin de Monistrol, à l'est du département, qui font partie du périurbain stéphanois.
Dans un site délicat à valoriser au plan urbanistique (buttes volcaniques affouillées par des vallées encaissées), Le Puy a tenté, après la Seconde Guerre mondiale, de s'industrialiser, modestement. Il ne reste presque rien de la tannerie et du travail de la chaussure. Quelques entreprises sont passées de la dentelle aux tissus élastiques et la distillation de la célèbre verveine du Velay est insignifiante en termes d'emplois, tout comme l'empaquetage de la non moins célèbre lentille A.O.C. des environs ; la laiterie-fromagerie est plus dynamique. Mais, en dépit d'un isolement relatif, bien réel, en attendant la voie rapide Lyon-Toulouse, la ville a su créer des zones industrielles modernes. Curieusement, les deux seules entreprises de taille notable (Michelin et M.S.D. Chibret) sont liées à Clermont-Ferrand, la métropole régionale, que l'on affecte d'ignorer en regardant vers Lyon. Dans un même temps, le tourisme religieux (dont les pèlerinages) est relancé avec l'aide de la hiérarchie ecclésiastique, et le Puy souhaite devenir un carrefour touristique pour le Velay, privilégiant les manifestations festives (fêtes Renaissance du Roi de l'Oiseau).[...]
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Écrit par
- Christian JAMOT : professeur des Universités, université Blaise-Pascal, Clermont-Ferrand
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Médias