LE SEIGNEUR DES ANNEAUX : LES ANNEAUX DE POUVOIR, série télévisée

En novembre 2017, la nouvelle n’avait pas manqué de défrayer la chronique : Amazon venait d’acquérir les droits d’une adaptation télévisuelle inspirée du monde imaginaire créé par J. R. R. Tolkien pour Le Seigneur des anneaux (paru sous forme de roman en trois volumes en 1954-1955), en s’engageant à produire une série d’au moins cinq saisons pour un montant global dépassant le milliard de dollars. À la fois pharaonique et inédit, ce contrat à long terme repoussait encore plus loin les limites auxquelles étaient prêts à s’astreindre les géants d’Internet pour s’imposer sur le marché mondial du divertissement. Netflix avait déjà obtenu les droits de développement des séries House of Cards (2013-2018) et The Crown (2016-) en garantissant aux porteurs de projets la mise en œuvre d’au moins deux saisons.

Cinq ans après cette décision ouvertement destinée à concurrencer Game of Thrones (HBO, 2011-2019), alors en cours de production, le hasard des calendriers a voulu que Le Seigneur des anneaux :Les Anneaux de pouvoir soit diffusé sur Prime Video, la plateforme de streaming d’Amazon, le 2 septembre 2022, soit douze jours seulement après le lancement sur la chaîne HBO (sur OCS en France) de House of the Dragon, série dérivée de Game of Thrones. Autrefois l’apanage des salles de cinéma, la confrontation entre deux blockbusters extrêmement attendus s’est ainsi déplacée sur des écrans au format plus réduit (sauf à l’occasion d’avant-premières fastueuses), au risque d’oblitérer une différence fondamentale : la série d’Amazon se veut beaucoup plus fidèle aux fondements du genre de la fantasy que la « franchise » de HBO.

L’ampleur d’une saga littéraire

Les événements narrés dans Les Anneaux de pouvoir se déroulent essentiellement sur la Terre du Milieu durant le Deuxième Âge, plusieurs milliers d’années avant ceux de Bilbo le Hobbit (paru en 1937 au Royaume-Uni) et du Seigneur des anneaux. Cela n’empêche pas quelques personnages marquants des adaptations cinématographiques de Peter Jackson (la trilogie du Seigneur des anneaux, de 2001 à 2003, puis celle du Hobbit, de 2012 à 2014) de réapparaître dans la série, comme Galadriel, interprétée ici par Morfydd Clark, ou Elrond, incarné par Robert Aramayo (respectivement à la place de Cate Blanchett et Hugo Weaving). Comment expliquer la présence de ces protagonistes malgré les millénaires qui séparent le récit des Anneaux de pouvoir de ceux des deux autres trilogies ? Galadriel et Elrond sont des elfes, créatures mythiques qui, dans le monde imaginaire de Tolkien, sont immortelles et ne connaissent pas les affres du vieillissement. Dans Les Anneaux de pouvoir, Galadriel se révèle pourtant être une femme d’action, emportée par la fougue de sa jeunesse. Si J. D. Payne et Patrick McKay, les showrunners de cette version télévisuelle, tiennent à ce que leurs personnages féminins ne s’en laissent pas conter (au risque, parfois, de s’écarter du récit originel de Tolkien), c’est particulièrement patent pour Galadriel, héroïne intrépide, valeureuse et déterminée, qui apparaît sans ambages comme la figure de proue de la série.

Fidèle aux sagas littéraires de fantasy dont l’œuvre de Tolkien constitue la pierre de touche, Les Anneaux de pouvoir regorge de contrées, de créatures hautes en couleur (dont les hommes ne sont qu’une espèce parmi d’autres) et d’intrigues parallèles. L’architecture et la longévité d’une série télévisée destinée à s’étendre sur cinq saisons semblent donc des plus adaptées. L’arc narratif principal s’articule autour de la lutte de Galadriel contre Sauron, lieutenant maléfique de Morgoth, en quête de l’anneau unique, le précieux sésame « pour les gouverner tous, […] et dans les ténèbres les lier ». Nous suivons également les tractations entre elfes et nains pour l’exploitation du mithril (métal rare qui protègera bien plus tard Bilbo[...]