LEBRUN PONCE DENIS ÉCOUCHARD- (1729-1807)
Parfois nommé Écouchard-Lebrun, il est aussi désigné par son surnom de Lebrun-Pindare, qu'il dut en son temps à la renommée de ses Odes. On peut se reporter, pour des renseignements assez complets sur sa vie et ses œuvres, aux articles que Sainte-Beuve lui consacre dans les Portraits littéraires (tome I) et dans les Causeries du lundi (tome V).
Lebrun est né dans la maison du prince de Conti, dont son père était valet de chambre. Il fait de brillantes études au collège Mazarin et manifeste dès l'enfance un talent pour la poésie. De plus, camarade de collège du jeune Racine (le petit-fils du poète), il reçoit les conseils de Louis Racine. Attiré par la poésie lyrique, il écrit des odes. En 1755, une Ode sur la ruine de Lisbonne lui est inspirée par la mort de son jeune ami Racine, victime du tremblement de terre. L'année suivante, dans son Ode sur les causes physiques des tremblements de terre, assortie d'un Discours sur le génie de l'Ode, il manifeste son désir d'égaler Pindare et Lucrèce.
En 1760, ayant rencontré une petite-nièce de Corneille réduite à la misère, il écrit une ode pour la recommander à Voltaire qui, touché, prend la jeune fille en charge. Fréron, à ce sujet, raille Voltaire et Lebrun à la fois ; ce dernier publie contre Fréron deux pamphlets : La Wasprie et L'Âne littéraire. Cette polémique développe les penchants satiriques de Lebrun, dont certaines épigrammes sont connues pour leur mordant, témoin cet exemple :
— On vient de me voler... — Que je plains ton malheur ! — Tous mes vers manuscrits... — Que je plains le voleur !
Le poète est sans doute porté à l'agressivité par une vie privée fâcheuse, un mariage (1759) marqué par des scènes de violence, une séparation (1774) qui détruit sa fortune ; il fait état de ce drame personnel dans son élégie intitulée Némésis. Il subsiste grâce à une pension annuelle, mais, malgré ces faveurs de la Cour, il se jette dans la Révolution avec un violent enthousiasme. En 1794, il célèbre la liberté et ses héros dans son Ode sur le vaisseau « Le Vengeur », qui est peut-être son œuvre la plus connue :
Voyez ce drapeau tricolore, / Qu'élève en périssant leur courage indompté, / Sous le flot qui les couvre, entendez-vous encore / Ce cri : Vive la Liberté !
On lui reproche même d'avoir provoqué par une de ses odes la violation des tombes royales de Saint-Denis :
De ces monstres divinisés, Que tous les cercueils soient brisés.
Il fait l'éloge de Robespierre dans l'avant-propos de son Ode sur l'Être suprême. Rallié à l'Empire, il reçoit diverses pensions et gratifications qui le mettent à l'abri du besoin pour la fin de sa vie. Il meurt à soixante-huit ans, laissant une grande réputation : il est alors un des grands poètes lyriques français.
De nos jours, on cite encore son Ode à Buffon (1771) comme un exemple intéressant de poésie scientifique — mais on se récrie sur l'emploi abusif dans sa poésie de la mythologie et des artifices rhétoriques.
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Écrit par
- Denise BRAHIMI : ancienne élève de l'École normale supérieure de Sèvres, professeure agrégée des Universités (littérature comparée), université de Paris-VII-Denis-Diderot
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