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MILLER LEE (1907-1977)

Lee Miller a connu une ascension fulgurante dans les années 1920 comme mannequin vedette pour Vogue et comme modèle de Man Ray, Edward Steichen ou George Hoyningen-Huene, avant de devenir elle-même photographe de mode, portraitiste et reporter de guerre. Amie des surréalistes, baroudeuse, son destin fascine. Son œuvre photographique est souvent regardée à l'aune de sa biographie mouvementée où se croisent artistes et mentors. C'est l'œuvre d'une vie qui épousa les courants de son époque : surréalisme, âge d'or de la photographie de mode et essor du photojournalisme.

Elizabeth dite « Lee » Miller est née à Poughkeepsie (New York) en 1907. À l'âge de vingt ans, sa beauté intemporelle est remarquée par Condé Nast, directeur des éditions du même nom, qui en fait l'un des mannequins vedettes de Vogue. En 1929, elle quitte New York pour Paris, rencontre Man Ray, devient son assistante, sa collaboratrice, son modèle, son amante et égérie. Sur ses traces, elle réalise des photos de mode, des nus et des portraits solarisés. En 1930, pour Le Sang d'un poète, son premier film, Jean Cocteau la choisit pour interpréter le rôle d'une statue. Ce film sur les mystères de la création s'achève quand le sculpteur donne vie à son œuvre de plâtre. La vie de Lee Miller sera souvent à cette image, peuplée d'hommes pygmalions dont elle voudra s'émanciper, à commencer par le premier d'entre tous, son père, Theodore, photographe amateur, qui réalisa d'elle des centaines d'études de nus.

En 1932, Lee Miller retourne à New York pour ouvrir son propre studio. Elle acquiert une certaine renommée en réalisant des photos de mode, des portraits et des publicités. Son exposition chez le galeriste Julien Levy (1933), pionnier de la photographie d'art, ne semble pas l'encourager à poursuivre une carrière artistique toute tracée. Son mariage avec Aziz Eloui Bey, en 1934, l'emmène vers d'autres contrées, notamment Le Caire, où elle s'installe. En Égypte, au milieu du désert et des vestiges archéologiques, elle retrouve un plaisir de photographier qui la conduira à faire d'autres voyages. En 1939, elle rejoint à Londres Roland Penrose, peintre surréaliste rencontré deux ans auparavant. Lors du Blitz de Londres elle fuit les bombardements et rejoint New York.

Aux côtés de David E. Scherman, photographe pour le magazine Life, Lee Miller se lance dans le photojournalisme avec, en poche, une accréditation de correspondante de guerre de l'armée américaine. Elle couvrira ainsi les hôpitaux militaires en Normandie, le siège de Saint-Malo, la Libération de Paris et la découverte des camps de Dachau et Buchenwald. Ses reportages témoignent de la rudesse des combats et de l'horreur de la guerre sans lyrisme ni effet de style. Moins épiques que Robert Capa et moins construites qu'Henri Cartier-Bresson, ses images peinent à trouver une place dans l'histoire de la photographie. Le public appréciera sa trajectoire exceptionnelle, mais l'historien aura du mal à faire ressortir des « icônes » incontournables. À Munich, en 1945, par une ironie révélatrice de son destin, elle pose pour David E. Scherman dans la baignoire de l'appartement d'Hitler et Eva Braun, entre le portrait du führer et la statuette dénudée d'une naïade néoclassique. Mise en scène d'un goût douteux ou pied de nez salvateur à l'Histoire, cette image dérangeante nourrira la légende d'une femme moderne et libre.

Après la guerre, Lee Miller reprend ses contributions à Vogue tout en rédigeant quelques articles. En 1947, un an avant de cesser toutes activités photographiques, elle épouse Roland Penrose et donne naissance à leur fils, Antony Penrose. Il est aujourd'hui en charge de ses archives riches de 60 000 négatifs, de notes et de manuscrits.[...]

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Écrit par

  • : graphiste, photographe, enseignant en histoire de la photographie, diplômé de l'École nationale de la photographie (Arles)

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