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LÉGALITÉ

La légalité, condition de l'état de droit

Sur le plan du droit positif, le principe de légalité engage des conséquences qui, pour ne mettre en cause aucune philosophie, n'en ont pas moins une portée considérable. Certes, sur les sujétions qu'elle impose aux individus, il est inutile de s'étendre : l'obligation d'observer les prescriptions de la réglementation en vigueur et les sanctions qui l'accompagnent pèsent sur une part de plus en plus considérable de la vie de chacun. Mais qu'en est-il de la situation des organes de l'État, et spécialement de l'Administration, en face de la légalité ? Ici ce n'est plus son fondement qui est en cause, mais l'étendue de son application.

L'étendue de la légalité

La réponse de principe est claire : toutes les autorités étatiques sont soumises à l'obligation de respecter non seulement les règles de droit qui, par leur origine, leur sont extérieures, mais encore celles qu'elles ont elles-mêmes établies : ainsi l'Administration est-elle tenue de se soumettre aux règlements qu'elle a faits et aux normes posées par le juge administratif qui procède d'elle. Là où cette obligation est consacrée par les principes du régime, on dit qu'il y a « État de droit » par opposition à l'« État de police » où les gouvernants et leurs agents sont affranchis de toute subordination à la légalité.

Si la soumission de l'Administration au principe de légalité doit demeurer incontestée, sa mise en œuvre doit cependant être conciliée avec les exigences propres à l'action administrative. À cet égard, on observera d'abord que le poids de la légalité ne pèse pas également sur toutes les autorités publiques. L'étendue de leur obligation dépend de la place où elles sont situées dans la hiérarchie administrative. À l'échelon inférieur, elles sont assujetties à l'ensemble de la légalité : ainsi, pour le maire, la légalité commence avec les arrêtés préfectoraux et remonte la pyramide des règles juridiques jusqu'à inclure la Constitution. Aux degrés intermédiaires, la légalité ne comprend que les règles posées par les autorités supérieures. Au sommet, pour le Premier ministre par exemple, elle n'est plus constituée que par la Constitution, la loi, les décrets autonomes et les principes généraux du droit qui, définis par la jurisprudence, ont valeur législative.

On notera, en second lieu, que si l'Administration est liée par les règles qu'elle a édictées, elle a la faculté de les modifier ou de les abroger. Ce n'est pas dire cependant que le principe de légalité ne joue plus, car le changement de réglementation est lui-même subordonné au respect de règles qui, quant à l'autorité compétente, au moment et aux formes, en conditionnent la régularité. Il est notamment à souligner que la modification de l'ordonnancement juridique ne peut pas rétroactivement porter atteinte aux droits conférés par la réglementation antérieure. Le principe de légalité est ainsi l'assise du respect des droits acquis.

Enfin et surtout, on doit considérer que l'application de ce même principe n'implique nullement la passivité des autorités administratives. Sans doute existe-t-il des cas où la loi leur impose d'agir dans un certain sens dès que sont réunies les conditions qu'elle fixe. Ainsi en va-t-il, par exemple, lors de la délivrance d'un permis de chasse. Dans cette hypothèse où la liberté d'appréciation de l'agent public est pratiquement nulle, on dit que sa compétence est liée. Il est évident que des situations de ce genre ne peuvent être multipliées sans dommage pour le bon fonctionnement de l'Administration. La loi ne peut tout prévoir, et il est même préférable qu'elle ne prévoie pas tout de façon à laisser aux fonctionnaires[...]

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Écrit par

  • : professeur à la faculté de droit et des sciences économiques de Paris

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